En bref

Ni la brochure publicitaire du constructeur d'un immeuble ni les plans que les parties se sont échangés au fur et à mesure de l'évolution du projet ne comportent de représentation trompeuse quant à l'emplacement des conduits de ventilation; une personne crédule et inexpérimentée aurait compris que la maison livrée ne serait pas exactement celle illustrée dans la brochure.

 

Résumé de l'affaire

Requête en réclamation d'une somme d'argent et de dommages-intérêts (132 339 $). Accueillie en partie (112 339 $). Demande reconventionnelle en réclamation d'une somme d'argent, de dommages-intérêts et de dommages punitifs (115 070 $). Rejetée.

En mai 2011, les défendeurs ont signé un contrat préliminaire avec la demanderesse visant l'achat d'un terrain et la construction d'une résidence. Le prix était de 417 900 $ et la prise de possession était prévue pour le 31 mai 2012. Avant le début des travaux, plusieurs modifications ont été apportées aux plans, lesquelles ont repoussé la prise de possession au 19 juillet 2012 et augmenté le prix d'achat à 536 392 $. Les travaux de construction ont commencé le 19 mars 2012. Au début du mois de mai, une fois les fondations terminées et avant de refermer les murs, la demanderesse a installé des conduits du système d'air soufflé. Les défendeurs ont alors constaté que l'emplacement de ceux-ci faisait en sorte que quelques angles des murs de leur résidence et certains espaces au plafond étaient amputés d'une petite surface en raison des conduits de la climatisation. Ils ont fait part de leur insatisfaction à la demanderesse, qui prétend avoir réglé la situation à leur entière satisfaction. Or, les demandeurs soutiennent n'avoir jamais accepté la présence de tels conduits. Ils ont refusé de passer titre comme prévu et la demanderesse, qui a vendu l'immeuble à un tiers en mai 2014, leur réclame la différence entre le prix convenu et celui obtenu. Elle réclame également le remboursement des frais d'entretien de l'immeuble ainsi que 20 000 $ pour les inconvénients subis. Les défendeurs invoquent la nullité du contrat pour cause de vice de consentement. Ils reprochent également à la demanderesse de ne pas avoir respecté les délais prévus pour accepter leur offre et d'avoir enfreint la Loi sur la protection du consommateur. Ils prétendent que la brochure de la maison modèle qu'ils ont choisie ainsi que les plans transmis par la défenderesse constituent des pratiques interdites puisqu'ils n'indiquent pas la présence de conduits de ventilation dans les angles de certaines pièces. De plus, la demanderesse aurait eu un comportement dolosif en cachant le fait que les conduits d'aération seraient camouflés derrière des boîtes. En demande reconventionnelle, ils réclament 65 070 $ en remboursement du dépôt qu'ils ont fourni et de frais engagés ainsi que 50 000 $ à titre de dommages-intérêts et de dommages punitifs.

 

Résumé de la décision

La vente d'un immeuble à usage d'habitation, bâti ou à bâtir, effectuée par un constructeur, doit être précédée d'un contrat préliminaire qui exige certaines stipulations particulières. La jurisprudence qualifie ce type d'entente de contrat mixte de vente et d'entreprise. En l'espèce, il n'y a pas lieu d'annuler le contrat préliminaire en raison du non-respect du délai de 10 jours par la demanderesse pour accepter l'offre des défendeurs. Les parties ont continué de négocier et de faire affaire ensemble pendant plusieurs mois suivant l'expiration de ce délai. Les défendeurs ne se sont jamais prévalus de leur faculté de dédit et le contrat préliminaire est valide. Par ailleurs, la demanderesse ne s'est pas livrée à une pratique interdite en ne représentant pas l'emplacement des conduits d'aération dans son matériel publicitaire. L'emplacement des tuyaux de climatisation peut varier selon les modifications aux plans exigées par les clients. Les illustrations que l'on trouve dans la brochure ne visent qu'à donner un aperçu général du modèle de maison. Même la personne crédule et inexpérimentée comprend que la maison livrée ne sera pas exactement celle illustrée dans la brochure. De plus, les défendeurs n'ont jamais indiqué que le fait de pouvoir garder les meubles qu'ils possédaient déjà et les disposer harmonieusement dans les pièces constituait une condition essentielle à l'achat de la maison. La demanderesse a suivi et respecté les plans échangés entre les parties. De plus, les défendeurs n'ont jamais agi comme s'ils avaient l'intention de résilier le contrat. Au contraire, après avoir constaté l'emplacement des conduits, ils ont continué de choisir des matériaux et de faire des visites sur le chantier. Même si le refus des défendeurs de signer l'acte de vente était en réalité fondé sur la perte de confiance en l'entrepreneur, cela ne donne pas ouverture à l'annulation du contrat ou au refus de passer titre. Il y a également lieu d'écarter l'argument selon lequel la maison, une fois construite, ne possédait pas la superficie annoncée. L'espace amputé par les boîtes recouvrant les conduits est minime, soit 0,27 % de la surface totale. Rien ne permet de conclure que la demanderesse a tenté de tromper les défendeurs. Au contraire, elle a toujours essayé de trouver des solutions pour satisfaire leurs exigences et pallier les désagréments causés par la présence des conduits d'aération. Les défendeurs ne sont pas fondés à refuser de passer titre. La réclamation de la demanderesse est accueillie, sauf en ce qui a trait aux dommages-intérêts.


Dernière modification : le 15 janvier 2016 à 21 h 56 min.