Interprétation
Protection du consommateur (Loi sur la), (RLRQ, c. P-40.1), art. 224
La Dépêche
ACTION COLLECTIVE (RECOURS COLLECTIF) : L'action collective déposée au nom des Québécois qui ont, depuis mars 2009, loué un véhicule automobile auprès de l'une des entreprises défenderesses et ont payé des frais non optionnels, lesquels se sont ajoutés au prix de location de base annoncé sur leur site Internet, n'est pas autorisée.
PROTECTION DU CONSOMMATEUR : L'utilisation du terme «prix annoncé» à l'article 224 de la Loi sur la protection du consommateur indique que le législateur a voulu couvrir toutes les formes de publicité, qu'elle soit promotionnelle ou informative.
Résumé
Demande en autorisation d'exercer une action collective. Rejetée.
Le demandeur soutient que le prix de base pour la location de véhicules figurant à la première étape de navigation des sites Internet des défenderesses viole les dispositions de la Loi sur la protection du consommateur en ce que ce prix exclut des frais non optionnels, lesquels sont ultérieurement facturés au consommateur. Selon lui, ce prix de base ne peut jamais être atteint, car les défenderesses ajoutent des frais non optionnels ultérieurement durant le processus de réservation. Le demandeur allègue également que ces frais sont présentés par les défenderesses dans leur site Internet respectif comme des taxes gouvernementales, alors qu'en réalité il s'agit de frais d'affaires. Il désire donc être autorisé à exercer une action collective au nom de tous les résidents du Québec qui ont loué un véhicule de l'une des défenderesses depuis mars 2009 et qui ont payé des frais non optionnels, lesquels ont été ajoutés au prix de base.
Décision
La défenderesse Entreprise Holdings inc. n'offre aucun service de location de voitures automobiles au Canada. Étant dénuée de fondement en fait et en droit, la présente demande contre elle est donc vouée à l'échec. D'autre part, la défenderesse Alamo Rent a Car n'est pas une personne morale légalement constituée. En fait, Entreprise fait affaire sous la raison sociale «Alamo», laquelle n'a pas de personnalité juridique. La demande dirigée contre cette dernière est donc rejetée. Toutefois, les allégations à l'encontre d'Alamo seront considérées comme visant Entreprise. Quant au fond du litige, l'article 224 de la Loi sur la protection du consommateur vise tant le domaine précontractuel que le domaine contractuel et, par conséquent, il s'applique aux sites de réservation de location de véhicules des défenderesses. Tel qu'il est énoncé dans Union des consommateurs c. Air Canada (C.A., 2014-03-07), 2014 QCCA 523, SOQUIJ AZ-51054788, 2014EXP-1078, J.E. 2014-583, l'utilisation du terme «prix annoncé» à l'article 224 de la loi indique que le législateur a voulu couvrir toutes les formes de publicité, qu'elle soit promotionnelle ou informative. Comme le prix de base s'inscrit dans une démarche tant promotionnelle qu'informationnelle, il constitue une annonce au sens de cette disposition. De plus, en affichant dans un premier temps un prix de base moins élevé que le prix total estimé, les défenderesses Hertz, Avis et Budget cherchent à attirer et à inciter les consommateurs à poursuivre leur recherche sur leur site de réservation. En fin de compte, si le consommateur y donne suite, c'est le prix total estimé qu'il devra payer. Le prix de base de ces défenderesses, qui paraît en premier lieu dans leur site Internet, est donc un prix annoncé au sens de l'article 224 c) de la loi. Il importe peu de savoir si des options seront ajoutées ou non au loisir du consommateur, le prix de base ne pouvant jamais être atteint, même dans l'éventualité où le consommateur désirerait louer une voiture sans ajouter d'options. C'est donc à la deuxième étape, si le recours est autorisé, que le juge devra déterminer si cette pratique contrevient à la loi. Cependant, la situation est différente en ce qui concerne Enterprise, y compris Alamo, puisque le prix total côtoie le prix de base tout au long du processus de réservation, ce qui ne semble pas contraire aux dispositions de la loi. Dans ce cas, les faits ne paraissent pas justifier les fins recherchées.
D'autre part, les allégations de la demande pour autorisation visant les représentations fausses et trompeuses quant à la nature des charges sont vagues, générales et imprécises. Qui plus est, certaines relèvent davantage de l'opinion, car le demandeur n'a jamais cliqué sur les liens accessibles sur les sites Internet des défenderesses afin de savoir ce qu'étaient ces charges. Même s'il est maintenant informé que les frais non optionnels ne sont pas des taxes, il continue de louer des véhicules des défenderesses, à l'exception de Hertz. En fait, le demandeur accepte de payer les frais non optionnels, car la nature de ces charges n'est pas pertinente dans sa décision de louer ou non un véhicule. Dans ces circonstances, les faits ne paraissent pas justifier les conclusions recherchées. Par ailleurs, le demandeur n'allègue aucun fait permettant de démontrer prima facie un comportement des défenderesses qui entraînerait l'attribution de dommages punitifs ou compensatoires. Au contraire, il affirme être satisfait des services, de la qualité et des prix offerts par ces dernières. Il y a donc lieu de conclure que le demandeur n'a pas démontré l'existence d'une «cause défendable» et qu'il ne satisfait pas aux critères établis au paragraphe 2 de l'article 575 du Code de procédure civile.
Le critère énoncé au paragraphe 4 de cette disposition n'est pas non plus rempli, car il a été démontré que le demandeur a tout simplement accepté de prêter son nom et son concours aux procureurs qui cherchaient quelqu'un pour entreprendre le présent recours. Les réponses données lors de son interrogatoire démontrent qu'il ne saisit pas les tenants et aboutissants de celui-ci et qu'il est impossible que l'affaire survive équitablement sans que cela ait des conséquences dans la conduite du dossier. De plus, il ne possède pas l'intérêt personnel pour agir.