RÉSUMÉ DE L’AFFAIRE

Appel d'une déclaration de culpabilité. Rejeté.

 

L'appelante est une agence de voyages ontarienne qui n'a pas d'activité ou d'établissement au Québec. En 2017, elle a été déclarée coupable sous 10 chefs d'accusation pour avoir laissé croire qu'elle était agent de voyages en annonçant la vente de forfaits de voyage sur les ondes d'une station de radio montréalaise alors qu'elle ne détenait pas de permis délivré conformément à la Loi sur les agents de voyages. Selon l'appelante, appliquer ainsi la loi québécoise à une entreprise ontarienne serait inconstitutionnel parce qu'il n'existerait pas de lien substantiel entre elle et le Québec. De plus, même en présence d'un tel lien substantiel, l'obliger à respecter les règles qui régissent les agents de voyages au Québec serait contraire au principe constitutionnel qui vise à favoriser l'intégration économique et les liens entre les provinces. Le Québec ne pourrait réglementer ainsi le commerce interprovincial, une matière de compétence fédérale. L'appelante prétend aussi qu'il serait injuste de l'assujettir à l'obligation de détenir un permis d'agent de voyages délivré en vertu des lois du Québec parce que la Loi sur les agents de voyages prévoit qu'un tel permis ne peut être délivré à une entreprise qui n'a pas d'établissement au Québec. Enfin, alors que sa culpabilité devait uniquement être déterminée en fonction de l'article 4 de la loi, l'appelante soutient que la déclaration de culpabilité se fonde erronément sur les critères prévus à l'article 14 du Règlement sur les agents de voyages.

 

RÉSUMÉ DE LA DÉCISION

Le fait que l'appelante n'ait aucun bien, employé ou activité au Québec n'empêche pas de conclure qu'elle a «laissé croire» au Québec qu'elle était agent de voyages. Il existe une distinction entre laisser croire que l'on est autorisé à effectuer certaines opérations et effectuer de telles opérations. De plus, déclarer l'appelante coupable d'une infraction à une loi québécoise alors qu'elle n'a aucun établissement ou employé dans cette province ne viole aucun principe constitutionnel. En effet, les publicités ont été diffusées à Montréal et s'adressaient au public montréalais. L'appelante a donc «laissé croire» au Québec. Le rattachement au territoire québécois, pour l'infraction reprochée, est suffisant. En outre, l'article 4 de la loi ne précise pas que le permis requis est un permis «délivré en vertu de la présente loi» ou de toute autre loi équivalente. Inclure ces termes par inférence dans la loi pour conclure que le permis de l'autorité ontarienne suffit à respecter l'exigence posée par la loi québécoise irait à l'encontre de l'objectif de la loi, laquelle vise à protéger le consommateur. L'argument de l'appelante selon lequel l'article 4 de la loi consacrerait une restriction inconstitutionnelle au commerce interprovincial est également rejeté. Cette disposition n'a ni pour objet ni pour essence de régir le commerce interprovincial, de compétence fédérale. Tout au plus, il pourrait s'agir d'un effet accessoire de la loi provinciale. En pareil cas, la disposition provinciale demeurerait conforme à la Constitution (R. c. Comeau (C.S. Can., 2018-04-19), 2018 CSC 15, SOQUIJ AZ-51486595, 2018EXP-1082). Enfin, même s'il a fait référence au Règlement sur les agents de voyages, le juge de première instance a envisagé la responsabilité pénale de l'appelante sous l'angle et à la lumière des critères prévus à l'article 4 de la loi.


Dernière modification : le 9 juin 2019 à 12 h 42 min.