Résumé de l'affaire

Requête en autorisation d'intenter un recours collectif et pour obtenir le statut de représentants. Rejetée.
Les requérantes désirent être autorisées à exercer un recours collectif au nom des Québécois ayant subi, soit à titre de victimes directes, soit à titre de victimes par ricochet, des dommages découlant des effets secondaires du médicament Trasylol (Aprotinin), fabriqué, commercialisé et distribué par l'intimée Bayer inc. avant le 21 septembre 2011. Le Trasylol est un médicament qui est injecté aux patients pendant certaines opérations cardiaques dans le but de diminuer les pertes sanguines et le recours à des transfusions. Les requérantes reprochent aux diverses entités reliées à la société pharmaceutique Bayer de ne pas avoir divulgué correctement les risques associés à ce médicament. Le mari de la requérante Ramacieri est décédé en 2004 à la suite d'une intervention chirurgicale au cours de laquelle on lui a administré ce médicament. La même année, la requérante Laporte a reçu du Trasylol lors d'un pontage aorto-coronarien. Elle a subi un accident cérébral vasculaire (ACV) 12 mois mois plus tard et a vécu un problème rénal en 2006.

Décision

Le premier critère énoncé à l'article 1003 a) du Code de procédure civile (C.P.C.) est ici rempli, car il existe des questions identiques, similaires ou connexes pour les personnes comprises à l'intérieur du groupe proposé. Quant au second critère, des études ont été publiées faisant état d'une possibilité accrue de complications et de risques qu'elles relient au Trasylol. Ces études ont entraîné une intervention de Santé Canada, une suspension de la commercialisation du médicament pendant quelques années et d'importantes mises au point de la part du fabricant. Il existe donc suffisamment d'éléments pour soutenir les prétentions des requérantes relativement à une connaissance et à une dénonciation insuffisantes des risques associés au Trasylol. Par conséquent, l'apparence de droit est respectée en ce qui concerne la faute reprochée. Il en est de même du préjudice, soit le décès du conjoint de la requérante Ramacieri et l'ACV de la requérante Laporte. Toutefois, présumer qu'un décès survenu dans le cours d'une opération cardiaque est imputable à la prise d'un médicament requiert plus qu'un énoncé général dans une procédure et plus qu'une pure hypothèse parmi tant d'autres, et ce, même si ce médicament présente des risques. Quant au cas de la requérante Laporte, ses problèmes sont survenus environ une année après son opération, ce qui rend encore plus hypothétique le lien que l'on fait avec la prise du Trasylol. Dans ces circonstances, tel que libellé, le recours individuel des requérantes est voué à l'échec en ce qui a trait à l'existence de la causalité nécessaire entre la faute qu'on allègue et le préjudice subi. Le second critère de l'article 1003 C.P.C. n'est donc pas rempli. Par ailleurs, leur requête ne contient aucune allégation selon laquelle plusieurs personnes ont subi un préjudice à la suite de la prise du Trasylol. L'absence de démonstration d'un groupe, du moins a priori, n'empêche pas le dépôt d'une poursuite individuelle, mais elle rend inapplicable la procédure du recours collectif. Cette troisième condition n'est pas non plus remplie. Enfin, seule la requérante Ramacieri aurait pu agir à titre de représentante; elle a démontré une détermination et une compétence adéquates à l'exercice de ce rôle. Quant à la requérante Laporte, elle ne maîtrise pas le dossier, éprouve de la difficulté à lire et s'en remet totalement à Ramacieri et aux procureurs.


Dernière modification : le 5 août 2022 à 15 h 52 min.