PROTECTION DU CONSOMMATEUR : Kia Canada inc. n'a pas fait de fausses représentations ni n'a contrevenu à ses obligations de garantie de conformité en offrant aux propriétaires d'un véhicule, dans le manuel du propriétaire, le choix entre 2 programmes d'entretien dont la fréquence varie en fonction des conditions d'utilisation du véhicule.
ACTION COLLECTIVE (RECOURS COLLECTIF) : L'action collective au nom des consommateurs qui ont acheté ou loué d'un concessionnaire Kia un véhicule dont le programme d'entretien inscrit dans le manuel du propriétaire, remis par le fabricant, diffère de celui exigé par le concessionnaire, est rejetée.

Résumé
Action collective en réclamation d'une somme d'argent et de dommages punitifs. Rejetée.

La demanderesse a été autorisée à intenter une action collective contre Kia Canada inc. au nom des consommateurs qui ont acheté ou loué un véhicule Kia de l'un de ses concessionnaires et dont le programme d'entretien exigé par le manuel du propriétaire, remis par le fabricant, diffère de celui exigé par le concessionnaire, lequel prévoit des entretiens plus fréquents, compte tenu du climat canadien.

La demande d'autorisation d'action collective, d'abord rejetée par la Cour supérieure, a été autorisée en 2015 par la Cour d'appel, qui a établi 4 questions de fait et de droit visant à déterminer si les fréquences d'entretien déclarées dans les manuels du propriétaire sont fausses, si cela constitue de la fausse représentation et s'il s'agit d'une pratique interdite au sens de la Loi sur la protection du consommateur.

En septembre 2019, durant l'instruction du dossier au fond, la demanderesse a choisi de modifier sa théorie de la cause, renonçant à invoquer le titre II de la Loi sur la protection du consommateur, visant les pratiques interdites et limitant ses plaidoiries au titre I de cette loi en lien avec l'obligation de garantie de conformité du fabricant. Elle n'a cependant pas été autorisée à modifier la procédure ni les conclusions à cet égard, si bien que la défenderesse a présenté une demande en irrecevabilité de la demande introductive d'instance, faisant valoir qu'elle n'était plus fondée en droit. Trois demandes de modification avaient précédemment été rejetées au motif que les modifications demandées étaient fondées sur des assises juridiques distinctes de celles de la demande ayant été autorisée.

Décision
Le fait que la demanderesse renonce à soumettre ses arguments de droit à l'égard des questions en litige autorisées n'entraîne pas l'irrecevabilité de la demande. En effet, elle n'a pas requis ni obtenu l'autorisation de se désister de sa demande, et aucune demande de révision ou d'annulation du jugement d'autorisation, en vertu de l'article 588 du Code de procédure civile, n'a été présentée. L'action collective, telle qu'elle a été autorisée par la Cour d'appel, est donc fondée sur les pratiques interdites prévues au titre II (art. 215 à 253) de la Loi sur la protection du consommateur. Cependant, aux fins d'une saine administration de la justice, il y a lieu de trancher les questions en litige sous l'angle du titre I (art. 8 à 214.30) de la Loi sur la protection du consommateur, même s'il s'agit d'un recours distinct de celui autorisé.

Les prétentions de la demanderesse selon lesquelles le programme d'entretien exigé par le manufacturier dans le manuel du propriétaire est l'entretien normal alors que celui exigé par le concessionnaire est l'entretien intense ne peuvent être retenues. En effet, l'impression générale créée par la lecture du manuel du propriétaire et du manuel de garantie est nette et sans ambiguïté: il revient au consommateur d'exercer un choix quant au niveau d'entretien de son véhicule, compte tenu des conditions dans lesquelles il est utilisé. Par ailleurs, l'impression générale qui se dégage de la lecture et de l'analyse visuelle des affiches ainsi que des dépliants préparés par Kia et transmis par les concessionnaires aux consommateurs après la livraison du véhicule amènerait un consommateur crédule et inexpérimenté à conclure que le fabricant et ses concessionnaires recommandent un entretien intense lorsque le véhicule est utilisé au Québec. Cette documentation n'est pas incompatible avec les manuels et elle ne permet pas de conclure à la fausseté des informations qui y sont contenues. D'autre part, ces impressions générales sont conformes à la réalité, soit que les consommateurs peuvent choisir l'un ou l'autre des programmes d'entretien sans que ce choix ait de répercussions sur la garantie.

Toutefois, il existe un réel problème découlant de représentations verbales faites par des concessionnaires aux consommateurs dans le contexte de discussions ayant précédé les contrats de réparation d'automobiles, certains établissant un lien entre le niveau d'entretien recommandé et le respect de la garantie du véhicule par Kia. Cependant, les concessionnaires ne sont pas visés par l'action collective, et la preuve ne permet pas de conclure que Kia, directement ou indirectement, incitait ou tolérait de telles représentations.

Par ailleurs, à la suite de la modification unilatérale de sa théorie de la cause, la demanderesse fait maintenant valoir que le contenu du manuel du propriétaire portant sur l'entretien diffère des déclarations écrites — notamment les dépliants — préparés par Kia et fournis aux consommateurs par les concessionnaires, ce qui constitue selon elle un manquement aux articles 40 à 42 de la Loi sur la protection du consommateur et entraînerait une présomption absolue de préjudice au consommateur.

Il n'y a pas eu de manquement aux obligations contractuelles de la part de Kia. En effet, seules les représentations précontractuelles et contractuelles sont pertinentes pour déterminer si le bien livré est conforme au contrat, aux déclarations, aux messages publicitaires ou aux représentations faites par le fabricant, le commerçant ou son représentant. Or, la demanderesse n'a pas repoussé son fardeau de démontrer que le véhicule qui lui a été livré ne respecte pas ses attentes à cet égard.

Par ailleurs, les représentations faites après la livraison du véhicule relativement aux fréquences d'entretien ne contreviennent pas à l'obligation de garantie de conformité du fabricant. En effet, ces représentations et le lien établi avec la garantie sont faites aux consommateurs au moment de la conclusion de contrats de services entre les concessionnaires et les propriétaires de véhicules, et non au moment de la conclusion de contrats d'achat de véhicules avec Kia. En outre, il s'agit de recommandations n'ayant pas d'effet sur la garantie offerte par le manufacturier. Les textes du manuel du propriétaire et du manuel de garantie sont suffisamment clairs pour permettre au consommateur crédule et inexpérimenté de comprendre qu'il a le choix entre les 2 programmes d'entretien. Enfin, la décision du manufacturier d'offrir ces options n'est pas de nature à confondre le consommateur ou à rendre inintelligible le régime d'entretien des véhicules.


Dernière modification : le 20 août 2023 à 12 h 21 min.