La Dépêche

CONTRAT DE SERVICES :  Un établissement hôtelier cubain qui cherche à empêcher, dans ses lieux, l'exercice d'activités illicites liées à la prostitution afin de se conformer aux lois du pays ne commet pas de faute civile; il en va de même d'une entreprise d'ici, telle Vacances Sunwing inc., qui retient les services de ce fournisseur au bénéfice de ses clients.

PROTECTION DU CONSOMMATEUR : Vacances Sunwing inc. n'est pas responsable du refus d'un hôtel cubain d'autoriser le demandeur à séjourner dans son établissement en compagnie d'une femme cubaine de 39 ans sa cadette qui n'était pas son épouse.

INTERNATIONAL (DROIT) : La Charte des droits et libertés de la personne n'a pas de portée extraterritoriale; en application de l'article 3126 C.C.Q., elle n'est d'aucun secours pour un voyageur dont «le fait générateur du préjudice» allégué est survenu à Cuba dans un hôtel qui n'a pas d'établissement au Québec.

 

Résumé

Demande en réclamation de dommages-intérêts (2 000 $). Accueillie en partie (550 $).

 

Le demandeur a acheté un forfait de voyage à Cuba au prix de 1 814 $ pour 2 personnes. Il est monté seul à bord de l'avion de Vacances Sunwing inc. qui partait de Montréal. Lorsqu'il est arrivé à destination, une femme cubaine avec laquelle il avait échangé des courriels l'attendait à l'hôtel. Or, cette femme était connue de l'hôtel et l'accès lui était refusé. Invoquant la grande différence d'âge, soit 39 ans, entre elle et le demandeur ainsi que le fait qu'ils n'étaient pas mariés, l'hôtel a refusé qu'ils séjournent ensemble dans son établissement. Le demandeur a proposé de louer une chambre additionnelle de manière à faire «chambre à part», mais en vain. L'hôtel était prêt à l'accueillir, mais sans sa compagne cubaine. La rigueur des sanctions pénales de l'État cubain contre les établissements hôteliers où ont lieu des activités liées à la prostitution fondait cette décision. Offensé, le demandeur a quitté l'établissement et son amie est retournée chez elle. Il a été contraint de louer une modeste chambre ailleurs, dans une «maison particulière», et de supporter le coût de tous ses repas. Il réclame 2 000 $ à Sunwing.

 

Décision

En sol québécois, l'hôtelier qui refuse d'héberger un couple dans son établissement en raison de la différence d'âge des personnes qui le forment et du fait qu'elles ne sont pas mariées s'expose à une allégation d'atteinte à la Charte des droits et libertés de la personne. Toutefois, la charte n'a pas de portée extraterritoriale. En application de l'article 3126 du Code civil du Québec, la charte n'est d'aucun secours pour le demandeur, car «le fait générateur du préjudice» allégué est survenu à Cuba et l'entreprise hôtelière cubaine n'a pas d'établissement au Québec.

 

Par ailleurs, l'établissement hôtelier cubain qui cherche à empêcher dans ses lieux l'exercice d'activités illicites liées à la prostitution afin de se conformer aux lois du pays ne commet pas de faute civile. Il en va de même de l'entreprise d'ici qui retient, au bénéfice de ses clients, les services de ce fournisseur. D'ailleurs, Sunwing est tenue d'assurer à ses clients un «environnement sécuritaire». Un hôtel qui tolère les activités liées à la prostitution dans son établissement peut compromettre la sécurité et la quiétude de sa clientèle. Par conséquent, on ne peut reprocher à Sunwing de faire affaire avec un fournisseur de services qui prend des moyens raisonnables pour assurer un environnement sécuritaire aux voyageurs qu'elle lui confie. Le demandeur a choisi librement de ne pas séjourner à l'hôtel. Il doit supporter les conséquences financières de ce choix. Puisque Sunwing y consent, il a droit au remboursement de la «portion terrestre non utilisée» par sa compagne cubaine (550 $).


Dernière modification : le 15 août 2022 à 18 h 05 min.