En bref

Un vendeur professionnel de machinerie agricole ne peut se prévaloir de la dénonciation tardive du vice caché que présente le tracteur qu'il a vendu.

Résumé de l'affaire

Action en résolution d'une vente et en remboursement du prix de celle-ci. Accueillie en partie.

Le 10 novembre 2001, les demandeurs ont acheté pour 20 704 $ un tracteur de la défenderesse, une entreprise spécialisée dans l'achat et la vente de machinerie agricole. Elle avait acheté le tracteur du défendeur en garantie en 2000. Lors de l'inspection préalable du véhicule, le demandeur s'est enquis auprès de la défenderesse des raisons de la présence d'un joint de silicone à l'arrière. Le défendeur en garantie affirme que le joint de silicone était présent quand il a lui-même acheté le tracteur. En septembre 2002, alors que Royer n'avait utilisé celui-ci que pendant 96 heures au cours d'une période de 10 mois, le système d'engrenage a cessé de fonctionner. Royer a appelé la défenderesse afin de lui signaler le problème et, en ouvrant le joint de silicone, les employés de celle-ci ont découvert que le bris avait été causé par la rupture des dents de la tige de la roue d'engrenage, qui avaient été soudées après une cassure précédente. Le 21 octobre 2002, la défenderesse a envoyé une facture de 5 958 $ pour les réparations. Le 16 janvier 2003, les demandeurs lui ont fait parvenir une mise en demeure dans laquelle ils exigeaient la résolution de la vente. Ils invoquent l'application du Code civil du Québec (C.C.Q.) et de la Loi sur la protection du consommateur. La défenderesse allègue que Royer n'a pas agi en acheteur prudent et diligent lors de l'inspection du tracteur et que les demandeurs s'en sont servis pendant près d'un an sans jamais dénoncer le vice. Le défendeur en garantie souligne que 35 mois se sont écoulés entre la vente de son tracteur à la défenderesse et l'appel en garantie et que le vice ne lui a jamais été dénoncé.

Résumé de la décision

La vente est un contrat de consommation au sens de la Loi sur la protection du consommateur et la défenderesse était tenue à l'obligation de garantie de qualité décrite à l'article 1726 C.C.Q. ainsi qu'aux articles 37 et 38 de la loi. Royer n'avait pas à ouvrir le joint de silicone au moment de l'inspection et il s'est comporté en acheteur prudent et diligent, au sens du deuxième alinéa de l'article 1726 C.C.Q. Par ailleurs, il s'est très peu servi du tracteur et l'on ne peut conclure à un usage abusif de sa part. La défenderesse étant un vendeur professionnel, il existe une présomption de connaissance du vice en vertu de l'article 1729 C.C.Q. et cette présomption est irréfragable, aux termes de l'article 53 de la loi. Outre le fait que la dénonciation verbale de Royer pourrait être considérée comme une dénonciation suffisante du vice aux termes de l'article 1739 C.C.Q., la défenderesse ne peut invoquer une dénonciation tardive à cause de son statut de vendeur professionnel. Étant donné le coût élevé des réparations effectuées au tracteur, la résolution de la vente doit être ordonnée. Suivant les articles 1702 et 1704 C.C.Q., compte tenu de la dépréciation qu'a subie le véhicule pendant ses 10 mois d'utilisation par Royer et du coût de location d'un équipement semblable pendant 96 heures à 20 $ l'heure, les demandeurs doivent verser une indemnisation de 3 000 $ à la défenderesse. De cette somme doivent être soustraits 100 $ pour la courroie de transmission que les demandeurs ont posée ainsi que les intérêts et l'indemnité additionnelle depuis le 10 novembre 2001, auxquels ils renoncent, ce qui laisse une compensation de 491 $. Les demandeurs ne réclament le paiement des intérêts et de l'indemnité additionnelle qu'à compter de l'assignation, soit le 10 juillet 2003. La défenderesse leur doit donc 20 213 $. Quant à la demande en garantie, le vice n'était pas inconnu de la défenderesse puisque son représentant n'a pas agi en acheteur prudent et diligent en se fiant seulement à une photographie avant d'acheter le tracteur et en ne dénonçant pas le vice au défendeur en garantie.


Dernière modification : le 11 mars 2005 à 17 h 42 min.