Résumé de l'affaire

Accusations d'avoir illégalement fait une représentation fausse ou trompeuse à un consommateur à l'occasion d'un message publicitaire (art. 277 et 219 de la Loi sur la protection du consommateur). Déclaration de culpabilité.

Ayant reçu une plainte d'une consommatrice relativement à un message publicitaire que l'accusée a fait publier dans les journaux, annonçant qu'à l'achat d'un lit d'eau le consommateur en obtenait un autre gratuitement, l'Office de la protection du consommateur (l'Office) a envoyé deux enquêteurs chez l'accusée. Invoquant l'article 307 de la loi et dans le but de consulter des documents reliés au message publicitaire, ces enquêteurs ont obtenu les factures de l'entreprise accusée et en ont gardé quelques-unes, qu'ils jugeaient pertinentes à leur enquête. L'accusée s'oppose à la recevabilité de ces documents, alléguant qu'ils ont été obtenus en violation de la protection accordée par la Charte canadienne des droits et libertés (art. 8) contre les fouilles, les perquisitions et les saisies abusives. Elle plaide que l'article 306 de la loi viole cette protection en donnant au président de l'Office et à ses enquêteurs le pouvoir très vaste de pénétrer chez un commerçant afin de vérifier ses registres et ses livres et de les saisir. De plus, elle prétend que, dans ces circonstances, il faut une autorisation judiciaire préalable (Hunter c. Southam Inc. (C.S. Can., 1984-09-17), SOQUIJ AZ-84111037, J.E. 84-770, [1984] 2 R.C.S. 145). Enfin, elle soutient que l'article 306 permet de vérifier si les registres sont bien tenus, mais non d'effectuer des vérifications afin de déceler des infractions à la loi. En ce sens, les enquêteurs auraient outrepassé leurs pouvoirs.

Résumé de la décision

L'énumération des divers éléments qui constituent le champ d'application de la Loi sur la protection du consommateur détermine la nature de celle-ci, laquelle est réglementaire. En ce sens, l'expectative du respect de la vie privée d'un commerçant visé par cette loi n'est pas la même que celle d'un citoyen soupçonné d'avoir commis une infraction criminelle. Il est donc raisonnable de permettre au président de l'Office ou à son représentant de pénétrer à une heure raisonnable dans l'établissement d'un commerçant afin d'inspecter ses livres et ses registres et d'exiger toute information utile à l'application de la loi. Ainsi, l'autorisation judiciaire préalable ne s'applique pas à la loi en raison de son caractère réglementaire. De plus, le but de la visite et, le cas échéant, de l'inspection consiste à s'assurer du respect de la loi et de ses règlements, qui visent le bien-être du public et non pas la sauvegarde de valeurs fondamentales comme celles qui sous-tendent les lois à caractère criminel. Bien que l'expectative du respect de la vie privée du commerçant existe, elle n'est pas raisonnable étant donné les objectifs de la loi. D'autre part, comme le champ d'application de la loi est très vaste, couvrant «tout contrat conclu entre un consommateur et un commerçant dans le cours de son commerce et ayant pour objet un bien ou un service», l'existence de motifs raisonnables et probables de croire que l'accusée est visée par la loi n'est pas essentielle pour permettre à un enquêteur d'examiner ses livres. Par conséquent, l'article 306 de la loi ne viole pas l'article 8 de la charte et les factures saisies sont recevables en preuve. En ce qui concerne la culpabilité de l'accusée, l'impression générale se dégageant de la publicité est la suivante: si un client achète un lit à 359 $, il en aura un deuxième gratuitement. Or, la réalité contredit cette impression dans la mesure où, en payant cette somme durant la période de vente visée, le consommateur payait l'équivalent de deux lits. En effet, le prix habituel d'un lit durant cette période était d'environ 180 $, en dehors de cette période, il était de 249 $, et le prix moyen était de 232 $.


Dernière modification : le 10 novembre 1993 à 12 h 16 min.