En bref
Même si un consommateur a admis être en retard dans ses paiements à l'institution financière, il a invoqué différentes dispositions de la Loi sur la protection du consommateur ainsi que de son règlement d'application afin de faire déclarer nul un avis de déchéance du bénéfice du terme; l'incurie dont il a fait preuve en signant avec la banque un contrat de vente à tempérament sur la base de fausses déclarations et d'omissions fonde à opposer une fin de non-recevoir à sa demande.
Résumé de l'affaire
Requête en réclamation d'une somme de 19 457 $. Accueillie.
Le 1er juin 2007, le défendeur a acheté à Auto Link Montréal une camionnette de marque Dodge Ram au prix de 25 694 $. Le même jour, les parties ont signé un contrat de vente à tempérament pour la somme de 22 677 $. Ce contrat indiquait que le défendeur exerçait le métier de couvreur. Avant la conclusion de cette entente, ce dernier avait signé une demande de prêt auprès de la banque demanderesse, dans laquelle il avait indiqué qu'il travaillait à SIB Accoustic à temps plein depuis trois ans à titre de couvreur pour un revenu mensuel brut de 4 267 $. D'ailleurs, une confirmation d'emploi et de revenu de cette compagnie était jointe à sa demande. Il a également déclaré dans ce document qu'il était propriétaire d'une résidence évaluée à 200 000 $ dont le solde hypothécaire était de 120 000 $. Contrairement à ce qu'il a affirmé, il payait seul cette hypothèque. De plus, au moment de la conclusion du contrat de vente à tempérament, il était au chômage. Il a acquis la camionnette afin de pouvoir démarrer une entreprise dans les domaines de l'excavation et de l'aménagement paysager. Ce projet n'a jamais vu le jour. Il a en outre omis de déclarer à la demanderesse deux autres prêts personnels. Le 18 juin 2008, celle-ci lui a transmis un avis de déchéance du bénéfice du terme lui réclamant la somme de 738 $. Cet avis était accompagné d'un état de compte indiquant que le solde de son obligation était de 19 195 $. La demanderesse réclame le solde dû en vertu du contrat liant les parties. Le défendeur a produit une défense fondée sur les articles 8 et 9 de la Loi sur la protection du consommateur. Il allègue que, au moment de la signature de ce contrat, il était incapable de verser à la demanderesse les mensualités prévues à l'entente étant donné qu'il était endetté et sans emploi. Son obligation était donc excessive, abusive et exorbitante. Il prétend également que l'avis de déchéance du terme n'est pas conforme à la loi.
Résumé de la décision
Le type de lésion invoqué par le défendeur doit être analysé en tenant compte des trois éléments d'appréciation énoncés à l'article 9 de la loi, soit la condition des parties, les circonstances dans lesquelles le contrat a été conclu et les avantages qui résultent du contrat pour le consommateur. En l'espèce, la demanderesse n'a pas été négligente dans l'exécution de son obligation de procéder à une enquête afin d'évaluer la situation financière du défendeur. En fait, ce dernier ne peut s'en prendre qu'à lui-même si un prêt de 22 677 $ lui a été accordé en raison de ses fausses déclarations ou de sa négligence à lire les contrats et les documents qu'on lui a présentés. D'autre part, si une disproportion entre les parties est née de la conclusion du contrat, elle résulte des mensonges ou des omissions du défendeur quant à sa véritable situation financière. Dans ces circonstances, il serait déraisonnable, voire abusif, de conclure à «l'exploitation du consommateur» alors qu'il est personnellement responsable des renseignements erronés fournis à la demanderesse. Quant aux avantages de l'entente conclue entre les parties, il appert que le défendeur n'utilise plus la Dodge Ram, car il n'a pas obtenu le financement requis pour mettre sur pied son entreprise. À cet égard, aucun reproche ne peut être adressé à la demanderesse. Le contrat de vente à tempérament ne peut donc être annulé en vertu des articles 8 et 9 de la loi. Par ailleurs, la demanderesse a agi de bonne foi à l'égard du défendeur dans le contexte de leur relation contractuelle. Quant à la validité de l'avis de déchéance du bénéfice du terme, celui-ci contenait des termes qui contrevenaient à l'annexe 2 de la loi. En outre, le défendeur soutient que l'état de compte joint à cet avis n'était pas conforme aux articles 67 et 68 du Règlement d'application de la Loi sur la protection du consommateur. Or, la Loi sur la protection du consommateur est une loi d'ordre public de protection qui a pour mission de protéger l'individu et de rétablir une certaine équité contractuelle. En l'espèce, il serait pour le moins aberrant que le défendeur puisse invoquer ces règles intéressant l'ordre public alors qu'il admet être en retard dans ses paiements à la demanderesse et que sa seule façon de contester la réclamation de celle-ci est de plaider l'exploitation de cette dernière ainsi que sa violation de la loi. L'incurie qu'il a démontrée en contractant avec la demanderesse sur la base de fausses déclarations et d'omissions constitue un comportement répréhensible qui justifie une fin de non-recevoir à son moyen de défense. Il doit donc payer à la demanderesse le solde de son obligation contractuelle.