La Dépêche

ACTION COLLECTIVE (RECOURS COLLECTIF) :  Le juge de première instance a erré en refusant d'attribuer à l'appelante le statut de représentante; il s'est trop immiscé dans l'analyse des pièces présentées au soutien de la demande pour autorisation, alors que les allégations qu'elle comportait étaient suffisamment claires.

RESPONSABILITÉ : Le juge de première instance a erré en refusant d'attribuer à l'appelante le statut de représentante; à l'étape de l'autorisation, cette dernière s'est acquittée de son fardeau d'alléguer que le médicament semblait comporter un danger qui ne lui avait pas été dévoilé en temps utile.

PROTECTION DU CONSOMMATEUR : Le juge de première instance a erré en déterminant, à l'étape de l'autorisation d'une action collective, que la Loi sur la protection du consommateur ne s'appliquait pas à la vente de médicaments à usage vétérinaire.

 

Résumé

Requête pour permission d'interjeter appel. Accueillie. Appels d'un jugement de la Cour supérieure ayant accueilli en partie une demande d'autorisation d'exercer une action collective. Accueillis en partie.

 

Les appelantes se pourvoient à l'encontre d'un jugement rendu par la Cour supérieure ayant accueilli en partie une demande pour autorisation d'exercer une action collective. Cette action collective est dirigée contre le distributeur canadien et le fabricant du produit Bravecto, un médicament prescrit par les vétérinaires afin de tuer les tiques et les puces qui infestent les animaux domestiques. Les appelantes allèguent avoir été induites en erreur quant à l'innocuité du Bravecto. Le juge de première instance a autorisé l'exercice de l'action collective, a attribué à l'appelante Gagnon le statut de représentante des membres du groupe, qu'il a redéfini, et a refusé d'attribuer ce statut à l'appelante Olenitch. Les appelantes soutiennent que le juge a erré en droit en imposant à l'appelante Olenitch un fardeau de preuve trop élevé à l'étape de l'autorisation. Elles allèguent également qu'il a commis une erreur de droit en décidant, au stade de la demande d'autorisation, que la Loi sur la protection du consommateur ne s'appliquait pas à la vente de médicaments à usage vétérinaire.

 

Décision

Le juge Sansfaçon: En ce qui concerne le statut de représentante qui a été refusé à l'appelante Olenitch, il semble que le juge se soit immiscé plus qu'il ne le devait dans l'analyse des pièces énoncées au soutien de la demande d'autorisation, alors que les allégations que celle-ci comportait étaient suffisamment claires. Son examen du dossier médical du chien d'Olenitch l'a amené à commettre des erreurs à l'égard d'éléments qui relèvent de la preuve au fond. Le juge paraît également s'être trompé dans son analyse de la preuve en écartant tout lien entre la prise du Bravecto et le problème de peau du chien.

 

À l'étape de l'autorisation, le fardeau d'Olenitch était d'alléguer que le produit semblait comporter un danger qui ne lui avait pas été dévoilé en temps utile, ce qu'elle a démontré puisque les problèmes subis par son chien ont été ajoutés à la monographie du produit en 2018. Ses allégations sont claires et ce sera au juge saisi du fond de déterminer si, à la lumière de la preuve, son fardeau a été repoussé. La demande d'Olenitch visant à être autorisée à représenter les membres lui est accordée.

 

Le juge a conclu que la Loi sur la protection du consommateur ne s'appliquait pas à un produit vendu sur ordonnance d'un vétérinaire, étant d'avis que Brousseau c. Laboratoires Abbott limitée (C.A., 2019-05-08), 2019 QCCA 801, SOQUIJ AZ-51593821, 2019EXP-1368, avait tranché la question. Dans cet arrêt, la Cour a conclu que la vente par un pharmacien d'un médicament destiné à la consommation humaine suivant une ordonnance médicale ne constituait pas un contrat de consommation. Il est vraisemblable que, tout comme pour les médicaments sur ordonnance destinés aux humains, le législateur n'ait pas voulu imposer aux fabricants de médicaments prescrits par un vétérinaire la présomption de la connaissance des dangers possibles associés au produit qui ont pu se matérialiser après sa commercialisation. Toutefois, de prime abord, un animal n'est pas un humain, et aucune preuve n'a encore été faite quant au processus requis pour que les médicaments qui sont destinés aux animaux soient mis en marché, de sorte qu'on ne peut, à cette étape préalable du dossier, leur attribuer l'exonération d'application de cette loi reconnue par la Cour dans Laboratoires Abbott limitée à l'égard des médicaments sur ordonnance destinés aux humains. Il y a lieu d'ajouter aux questions de fait et de droit celle de savoir si la Loi sur la protection du consommateur est applicable.

 


Dernière modification : le 15 août 2022 à 17 h 43 min.