Résumé de l'affaire

Demande d'autorisation d'exercer une action collective. Accueillie.
Le demandeur, un ancien employé de la défenderesse, Société canadienne des postes (Postes Canada), actuellement retraité depuis 2007, demande l'autorisation d'exercer une action collective contre cette dernière. Il propose de définir le groupe de la façon suivante: «Toute personne qui, depuis le 1er juillet 2013, est ou a été un employé ou un retraité de la Société canadienne des postes, et qui résidait dans la province de Québec entre 2013 et aujourd'hui ou qui y a résidé pendant une partie de la période susdite et qui a dû débourser des sommes excédentaires à la contribution maximale annuelle prévue par la Loi sur l'assurance médicaments, en raison de la couverture d'assurances offerte par Postes Canada.» Selon le demandeur, le régime de soins médicaux complémentaire en vigueur depuis le 1er janvier 2008 contrevient, pour les employés et les retraités du Québec, à la Loi sur l'assurance médicaments puisque les contributions que ces employés et retraités doivent désormais supporter dépassent les contributions maximales annuelles prévues par cette loi et sa réglementation. Le demandeur réclame par voie d'injonction permanente que Postes Canada rende son régime de retraite conforme à la loi. Il demande également, pour lui et tous les membres du groupe, le remboursement de toutes les sommes payées au-delà des seuils établis par la loi.

Décision

L'article 575 paragraphe 2 du Code de procédure civile (C.P.C.) exige que les faits allégués paraissent justifier les conclusions recherchées. Cette apparence de droit doit être analysée à la lumière du cas personnel du demandeur, et non de celui de tout le groupe. Or, en l'espèce, le demandeur a sans équivoque démontré une cause défendable. Quant aux dommages-intérêts réclamés, le tribunal est d'avis qu'il y a apparence de droit puisque la violation de la Loi sur l'assurance médicaments donne lieu à la demande de remboursement des sommes payées en trop. Le fait que le demandeur n'ait pas chiffré le quantum du remboursement qu'il réclame pour lui et pour les membres du groupe n'est pas un obstacle à l'autorisation de l'action collective. L'apparence de droit tend à démontrer que ces dommages existent. De plus, seul un procès au mérite pourra déterminer, le cas échéant, exactement quels membres ont droit à des remboursements et à quelle hauteur. Il est également acquis depuis longtemps que des conclusions en injonction permanente sont permises en matière d'action collective lorsqu'elles sont associées à des conclusions en dommages, ce qui est le cas ici. Quant à l'article 575 paragraphe 1 C.P.C., la jurisprudence veut que la présence d'une seule question de droit ou de fait identique, similaire ou connexe soit suffisante, pourvu que son importance soit susceptible d'influer sur le sort du recours. En l'espèce, les questions soumises de façon commune par les parties sont identiques, similaires ou connexes. Elles visent tous les membres du groupe en cause et sont toutes d'une grande importance quant à la résolution du litige pour tous ces membres, peu importe les moyens de défense anticipés et peu importe le caractère potentiellement individuel de ces moyens de défense. Ce critère est donc rempli. Quant à la composition du groupe, elle justifie l'exercice de l'action collective (art. 575 paragr. 3 C.P.C.). En effet, la demande d'autorisation fait état de plusieurs centaines de membres potentiels dans le groupe — voire des milliers —, compte tenu du nombre de salariés actifs et retraités de Postes Canada. Ces membres vivent partout au Québec, mais une forte proportion réside dans le district judiciaire de Montréal. Par contre, la définition du groupe doit être objective, être limitée dans le temps et dans l'espace et correspondre à la preuve contenue au dossier au stade de l'autorisation. Ici, le tribunal n'accepte pas la date d'ouverture initialement proposée du 1er juillet 2013 puisqu'elle ne correspond pas à la prescription applicable de trois ans. Compte tenu du fait que la demande d'autorisation a été déposée le 8 juillet 2016, cette date doit constituer la date d'ouverture. D'autre part, la définition du groupe doit aussi généralement avoir une date de fermeture, le groupe ne pouvant rester «ouvert indéfiniment» et ne pouvant généralement prendre fin à une date postérieure au jugement qui le définit. Or, dans le présent cas, l'apparence de droit veut que la violation de la Loi sur l'assurance médicaments continue à ce jour. De plus, une injonction permanente est demandée afin de faire cesser cette violation. Ainsi, il y a lieu de conclure que la fin du groupe sera la date du jugement final au mérite. Enfin, le tribunal est d'avis que la représentation par le demandeur est adéquate (art. 575 paragr. 4 C.P.C.). Étant donné que tous les critères énoncés à cet article sont respectés, l'action collective doit être autorisée.


Dernière modification : le 17 août 2024 à 18 h 06 min.