Résumé de l'affaire
Appel d'un jugement de la Cour supérieure ayant accueilli en partie une requête en réclamation de dommages-intérêts et rejeté un recours en garantie. Accueilli en partie.
En mai 2004, les appelants ont acheté un immeuble des intimés. Selon la fiche descriptive de la propriété, il s'agissait d'un immeuble bigénération, dans le sous-sol duquel les intimés avaient aménagé un logement. Lorsqu'ils ont demandé un permis de construction pour entreprendre des travaux de rénovation, les appelants ont essuyé un refus, car l'aménagement de l'espace résidentiel en annexe au logement principal ne respectait pas la réglementation municipale applicable en matière d'habitation bigénération, notamment quant à la grandeur et à la hauteur des pièces. Le coût des travaux requis pour rendre l'immeuble conforme s'élève à 70 709 $. Les appelants ont intenté un recours en réclamation de dommages-intérêts contre les intimés, invoquant notamment leur obligation de délivrance et la garantie de droit de propriété. Mis à part une réclamation concernant des problèmes de plomberie et de structure, la juge de première instance a rejeté leur requête, ayant conclu qu'ils n'avaient pas agi comme des acheteurs prudents et diligents l'auraient fait. Selon elle, ils n'avaient pas prêté suffisamment attention aux caractéristiques de la maison et ils auraient dû vérifier auprès des autorités compétentes que la destination qu'ils entendaient donner à l'immeuble était conforme à la réglementation municipale. Pour leur part, les intimés contestent les conclusions du jugement qui rejettent leur appel en garantie contre leur courtier immobilier et l'agence pour laquelle celui-ci travaille.
Décision
M. le juge Gagnon: La garantie du droit de propriété mentionnée à l'article 1716 du Code civil du Québec inclut celle inhérente aux limitations de droit public. Quant à l'obligation de délivrance, soit une obligation de résultat, elle est assortie d'une obligation accessoire de renseignement devant permettre à l'acheteur de se faire une idée raisonnable de la conformité du bien vendu au regard de ses attentes légitimes. En l'espèce, les intimés n'ont pas respecté ces garanties auxquelles ils sont tenus. Ils ne pouvaient ignorer la manière dont l'immeuble avait été décrit dans la fiche de propriété rédigée par les courtiers ni le fait que cette information était susceptible d'induire en erreur les appelants. Ils savaient également que ces derniers étaient à la recherche d'une habitation bigénération. L'immeuble vendu correspondait aux caractéristiques annoncées dans la publicité des courtiers et répondait aux attentes des appelants. Les intimés se sont engagés à livrer aux appelants une habitation bigénération et cet engagement était assorti de la garantie que cet usage soit autorisé par la réglementation municipale. Ils ne peuvent invoquer leur bonne foi afin de se soustraire à cette obligation légale. Ils savaient que les travaux d'aménagement du logement nécessitaient la délivrance d'un permis de construction, mais ils ont choisi de ne pas se conformer à la réglementation municipale. Les appelants, qui n'ont pas de connaissances particulières dans le domaine des habitations bigénération, n'ont pas manqué de diligence. On ne peut leur reprocher de ne pas avoir constaté le non-respect des normes relatives à la grandeur et à la hauteur des pièces. Ils étaient en droit de présumer que l'immeuble qu'ils achetaient était réglementaire et que la destination donnée à cette habitation par les intimés de même que son usage au moment de la vente étaient conformes à la réglementation en vigueur. La juge de première instance a erré en n'accordant pas suffisamment de poids à cette présomption. Les appelants sont en droit d'obtenir une indemnité de 70 709 $ pour les travaux correctifs ainsi que des dommages-intérêts 11 427 $. Enfin, le recours en garantie doit être rejeté, car les courtiers ont agi dans les limites de leur mandat, avec l'assentiment de leurs clients, en publiant une information conforme à l'usage qui était fait de l'immeuble. De plus, leur mandat s'est terminé bien avant que la vente ne soit conclue, et les vendeurs sont les seuls responsables d'avoir réalisé des travaux sans obtenir les permis requis par la ville.