en bref

La juge n'a pas imposé à l'acheteur d'un véhicule un fardeau de preuve trop lourd en le privant de la présomption légale de l'existence d'un vice caché prévue à l'article 1729 C.C.Q.

La juge ne pouvait conclure à une usure prématurée du moteur du véhicule du demandeur sans la preuve de la durabilité d'un bien identique ou de même espèce.

Avant la réparation du moteur de son véhicule, l'acheteur a omis de transmettre une mise en demeure à la fabricante du bien afin de lui permettre d'examiner le vice allégué, de l'expertiser et de le réparer; il ne peut donc pas réclamer à cette dernière le remboursement du coût des réparations.

La norme de contrôle applicable à la révision d'une décision de la Cour du Québec, Division des petites créances, en matière de vice caché est celle de la décision raisonnable.

résumé de l'affaire

Requête en révision judiciaire d'un jugement de la Cour du Québec, Division des petites créances, ayant rejeté une réclamation en dommages-intérêts. Rejetée.

Le 16 avril 2002, le demandeur a acheté de la mise en cause Kollbec Gatineau Chrysler Jeep inc. un camion neuf de marque Dodge RAM, fabriqué par la mise en cause Chrysler Canada inc. Le 16 mars 2007, il a été informé de l'existence d'un problème sérieux au moteur, soit la présence de fissures dans les joints de culasse ou d'une fêlure à l'une des têtes de celui-ci. Les mises en cause ont refusé de supporter les coûts de la réparation étant donné que la garantie conventionnelle était expirée. Le 10 avril suivant, le demandeur a transmis à ces dernières une mise en demeure dans laquelle il réclamait le coût des réparations effectuées à son véhicule, soit 3 690 $. Le 8 mai, il a déposé devant la Cour du Québec, Division des petites créances, une requête en dommages-intérêts de 4 190 $ contre elles. Comme le demandeur n'avait pas déterminé la cause du bris du véhicule, la juge de la Cour du Québec a conclu qu'il n'avait pas démontré l'existence d'un vice caché imputable à Chrysler. Le lien entre le bris et une faute de cette dernière ou de Kollbec, qui a procédé à l'entretien du véhicule, n'a pas non plus été établi. En outre, le véhicule a été réparé par un tiers, et Kollbec n'a jamais eu la possibilité de l'analyser, de l'expertiser ou de faire les réparations requises. Le demandeur prétend que la juge a erré en lui imposant un fardeau de preuve trop lourd, le privant ainsi de la présomption légale de l'existence d'un vice caché prévue à l'article 1729 du Code civil du Québec (C.C.Q.) et aux articles 37, 38 et 53 de la Loi sur la protection du consommateur. Selon lui, elle a commis une erreur déraisonnable en concluant qu'il devait transmettre une mise en demeure écrite aux mises en cause avant que les travaux de réparation ne soient effectués.

résumé de la décision

Suivant l'arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick (C.S. Can., 2008-03-07), 2008 CSC 9, SOQUIJ AZ-50478101, J.E. 2008-547, D.T.E. 2008T-223, [2008] 1 R.C.S. 190, la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable. En vertu des articles 1726 et 1730 C.C.Q., le vendeur et le fabricant sont tenus de garantir que le bien vendu est exempt de vice caché. En cas de vente par un vendeur professionnel, l'existence d'un vice au moment de la vente est présumée lorsque le mauvais fonctionnement du bien survient prématurément par rapport à des biens identiques (art. 1729 C.C.Q.). Or, la juge ne pouvait conclure à une détérioration prématurée du bien sans la démonstration de la durabilité d'un bien identique ou de même espèce. De plus, le fait qu'un bris soit survenu après l'expiration de la garantie conventionnelle est insuffisant pour conclure à l'existence de la preuve par présomption. Dans ces circonstances, la juge n'a pas rendu une décision déraisonnable en concluant à l'absence d'un vice caché. Par ailleurs, tel qu'il est énoncé dans Weiss c. Raschella (C.A., 2009-11-09), 2009 QCCA 2186, SOQUIJ AZ-50584232, J.E. 2009-2186, l'envoi d'une mise en demeure écrite est requise afin de permettre au vendeur ou au fabricant d'examiner le vice allégué, de l'expertiser et d'y remédier, sauf lorsque le bien est menacé d'un dépérissement immédiat ou lorsque le vendeur a répudié sa responsabilité à l'égard du vice, ou encore s'il a renoncé à ce préavis (art. 1739 C.C.Q.). En l'espèce, la juge a eu raison de conclure que le demandeur ne pouvait se soustraire à son obligation d'aviser les mises en cause avant de procéder à la réparation de son véhicule.


Dernière modification : le 13 janvier 2010 à 15 h 40 min.