Résumé de l'affaire

Réclamation en dommages contre une compagnie de transport. Accueillie (1 011 $).

L'ordinateur que le requérant envoyait à Montréal pour être réparé a été endommagé lors du transport effectué par l'intimée. Cette dernière allègue que la réclamation n'a pas été présentée dans le délai de neuf mois prévu au contrat et que ce dernier contient une clause de limitation de responsabilité applicable en l'espèce. Cette clause prévoit que le montant de tout «dommage dont le transporteur pourrait être responsable ne doit pas excéder 2 $ la livre calculé sur le poids total de l'expédition, à moins qu'une valeur supérieure n'ait été déclarée sur le recto du connaissement par l'expéditeur».

Résumé de la décision

La doctrine étudiée conclut que la seule façon de limiter l'effet d'une clause d'exclusion ou de limitation de responsabilité serait de démontrer une faute lourde. Les articles 1470 et 1474 du Code civil du Québec (C.C.Q.) (L.Q. 1991, c. 64) reprennent ce principe et semblent imputer au réclamant le fardeau de démontrer que le bénéficiaire de la stipulation a commis une faute lourde ou intentionnelle. De plus, les articles 2034, 2052 et 2053 C.C.Q. délimitent la responsabilité du transporteur tout en n'excluant pas la légalité d'une clause de limitation de responsabilité. En l'espèce, compte tenu de la clause de limitation, de l'omission du requérant de déclarer la valeur de l'objet et de l'absence de preuve d'une faute lourde de l'intimée, il y aurait lieu de conclure au rejet de la réclamation si on se limitait aux dispositions du code civil. Cependant, il s'agit d'un contrat entre un consommateur et un commerçant dans le cours de son commerce et ayant pour objet un service. Par conséquent, la Loi sur la protection du consommateur s'applique et l'article 1384 C.C.Q. prévoit que le champ d'application du contrat de consommation est délimité par les lois relatives à la protection du consommateur. Or, l'article 10 de la loi interdit toute stipulation par laquelle un commerçant se dégage des conséquences de son fait personnel ou de celui de son représentant. Par ailleurs, le Règlement sur les exigences applicables aux contrats et connaissements et sur les stipulations minimales que doivent contenir les contrats de transport prévoit notamment que, dans le cas où une marchandise de très grande valeur est endommagée, la responsabilité du transporteur ne peut être engagée au-delà de la limite établie à l'article 10 du règlement si aucune entente spéciale n'a été conclue et que la nature de la marchandise n'a pas été révélée dans le connaissement. Toutefois, les dispositions de ce règlement ne peuvent faire échec à l'application de la Loi sur la protection du consommateur. En effet, le champ d'application du règlement est distinct de ceux en matière de consommation et, dans le cas de conflit entre la réglementation en matière de transport et celle en matière de consommation, la volonté manifeste du législateur est que cette dernière prédomine. De plus, le règlement ne s'applique pas au transport de biens domestiques usagés. Or, l'ordinateur transporté était la propriété du requérant et était installé dans sa résidence. Enfin, la nature de la marchandise avait été dévoilée à l'intimée lors de la signature du connaissement. Par conséquent, en vertu de la Loi sur la protection du consommateur, l'obligation de résultat qui incombait à l'intimée ne pouvait être nuancée par une clause de limitation de responsabilité. De même, la prescription de neuf mois prévue dans la clause limitative est inopposable et c'est la prescription de trois ans prévue à l'article 273 de la loi précitée qui s'applique.


Dernière modification : le 15 décembre 1994 à 16 h 01 min.