En bref

Un dentiste qui acquiert un tableau pour l'exposer dans son cabinet est un consommateur.

Résumé de l'affaire

Appel d'un jugement de la Cour supérieure ayant annulé un contrat de crédit-bail. Rejeté.

L'intimé, un dentiste, a acheté dans une galerie une aquarelle du peintre Marc-Aurèle Fortin, qu'il a exposée dans son cabinet. Le prix d'achat de 50 000 $ était payé par le biais d'un crédit-bail prévoyant 65 versements mensuels et consécutifs. Ce contrat a été cédé à l'appelante le jour de sa signature. Après avoir effectué 40 versements, l'intimé a appris que le tableau n'avait qu'une valeur de 20 000 $. Il l'a alors remis à l'appelante et a cessé ses paiements. L'appelante a réclamé le solde dû en vertu du contrat de crédit-bail tandis que l'intimé a requis le remboursement des versements effectués. Le premier juge, considérant que l'intimé était un consommateur lorsqu'il a signé le contrat de crédit-bail, a annulé celui-ci parce qu'il ne respectait pas les prescriptions de la Loi sur la protection du consommateur et a ordonné le remboursement des versements effectués.

 

Résumé de la décision

le juge Forget: L'article 1 de la Loi sur la protection du consommateur ne donne pas une définition précise de ce qu'est un consommateur. Il procède plutôt par la négative en mentionnant qu'il s'agit d'une personne physique, sauf un commerçant, qui se procure un bien ou un service pour son commerce. C'est à bon droit que le premier juge a conclu que l'intimé n'était pas un commerçant de tableaux. Celui-ci a traité avec un seul vendeur, qui a exploité son inexpérience. L'intimé a pu croire, comme tous les acheteurs en ce domaine, que les oeuvres achetées acquerraient une valeur supplémentaire avec les ans, sans devenir pour autant un marchand de tableaux. Même si l'achat du tableau dont il est question en l'espèce n'est que 1 transaction parmi 16 autres qui se sont échelonnées sur une période d'un peu plus d'un an, l'intimé est demeuré un consommateur. On arrive à la même conclusion si on examine la transaction à partir de la finalité du bien acquis. En effet, si on s'attache uniquement à la transaction en cause, on doit conclure que le tableau a été acquis à des fins professionnelles, soit la décoration du cabinet de l'intimé. La loi distingue les artisans et les professionnels des commerçants. La doctrine et la jurisprudence semblent d'ailleurs unanimes à reconnaître que le professionnel qui achète ou loue un bien pour l'exercice de sa profession bénéficie de la protection de la loi. Il n'y a pas lieu de faire de distinction entre les outils expressément nécessaires à la profession et les biens accessoires. L'appelante ne peut prétendre avoir été lésée, car le contrat qui lui a été cédé fait bien voir que l'intimé est un dentiste et que le tableau sera exposé dans son cabinet. Par contre, si on s'attarde à l'ensemble des transactions, on doit conclure que les tableaux ont été acquis à des fins personnelles. Or, un commerçant peut bénéficier de la protection légale s'il se procure un bien à des fins personnelles, et, au même titre, un professionnel ou un artisan faisant l'acquisition d'un bien à des fins commerciales bénéficient de la même protection. Même si on retenait que l'intimé a traité dans un but purement spéculatif, rien n'empêche un consommateur de rechercher un profit à des fins personnelles. Le crédit-bail devant être assimilé à une vente, le contrat devait donc être résolu plutôt que résilié. En effet, le tableau qui a été remis à l'appelante n'a pas perdu de valeur. De plus, les versements effectués par l'intimé avaient pour but de payer le coût d'acquisition et ne correspondaient pas à un loyer pour un usage mensuel.


Dernière modification : le 3 janvier 2001 à 14 h 01 min.