En bref
Un recours collectif est autorisé contre une banque ayant imposé sur les cartes de crédit des frais d'avance de fonds que les requérants considèrent comme illégaux.
Résumé de l'affaire
Requête pour autorisation d'exercer un recours collectif. Accueillie en partie.
Les requérants désirent exercer un recours collectif au nom des personnes physiques parties à un contrat de crédit variable conclu au Québec avec les institutions financières intimées et à qui celles-ci ont imposé des frais d'avance de fonds pour des transactions au Canada ou à l'étranger. La requérante Desjardins-Émond est la personne désignée. Elle est détentrice d'une carte de crédit de la Banque Canadian Tire. Le 8 septembre 2004, l'intimée Banque Canadian Tire lui a transmis un état de compte de sa carte de crédit MasterCard. Elle lui aurait illégalement imposé des frais d'avance de fonds, aux termes de la Loi sur la protection du consommateur. Toutes les autres intimées auraient utilisé cette même méthode de calcul pour les avances à leurs clients. Elles invoquent l'insuffisance des allégations de la requête ainsi que l'absence d'intérêt suffisant et de lien de droit avec elles.
Résumé de la décision
En ce qui concerne l'insuffisance des allégations pour les intimées autres que la Banque Canadian Tire, la requête n'énonce aucun fait assez précis pour permettre de vérifier si les conditions d'ouverture du recours sont remplies. Elle ne fait état que d'un rapport qui s'est révélé vague et imprécis. Elle ne respecte donc pas les exigences formulées à l'article 1002 du Code de procédure civile (C.P.C.). De plus, les requérantes n'ont pas l'intérêt suffisant puisque Desjardins-Émond ne possède que la carte de crédit de Banque Canadian Tire. En matière de recours collectif, un intérêt né et actuel dans les questions communes à l'ensemble du groupe ne suffit pas. La nécessité de démontrer un intérêt suffisant, d'une part, et une dimension commune ou collective, d'autre part, sont deux éléments distincts qui doivent coexister mais qui ne sont pas tributaires l'un de l'autre. Alléguer simplement que d'autres membres du groupe auraient un recours contre les autres intimées au motif que leur situation serait la même que celle de la personne désignée en rapport avec sa propre banque ne remplit donc pas les critères d'intérêt ou de lien de droit. Par conséquent, le recours est rejeté à l'endroit de toutes les intimées, à l'exception de la Banque Canadian Tire. Par ailleurs, en ce qui concerne les conditions prévues à l'article 1003 C.P.C., la composition du groupe rend difficile l'application des articles 59 et 67 C.P.C. Les détenteurs de cartes de crédit de la Banque Canadian Tire se comptent par milliers. De plus, les sommes liées à d'éventuels recours individuels ne justifient pas les débours et les frais judiciaires que pourrait supporter chacun des membres. En outre, l'association requérante est en mesure d'assurer une représentation adéquate des membres du groupe. Il en est de même de la personne désignée, qui est un membre directement visé par le groupe décrit. Au surplus, les faits allégués paraissent justifier les conclusions recherchées. Les requérants soutiennent que le contrat entre le consommateur et la Banque Canadian Tire relativement à une carte de crédit est un contrat de crédit variable, aux termes de l'article 118 de la Loi sur la protection du consommateur. Les frais d'avances de fonds payés par Desjardins-Émond seraient des frais de crédit en vertu de l'article 69 de la loi. Comme il ne s'agit pas de capital net, ces frais doivent être inclus dans le calcul du taux de crédit, selon ce que prévoit l'article 72. Or, aux termes de l'article 92 de la loi, de tels frais doivent être calculés selon la méthode de type actuariel prescrite au Règlement d'application de la Loi sur la protection du consommateur. Celui-ci prévoit un calcul effectué quotidiennement qui s'exprime en termes de pourcentage, et non un montant forfaitaire similaire à celui exigé par la Banque Canadian Tire. Ces frais d'avance de fonds devraient donc être inclus dans les frais de crédit et figurer dans le taux annuel inscrit à l'état de compte, ce qui ne serait pas le cas. Selon les requérantes, cette situation donnerait ouverture aux sanctions prévues à l'article 272 de la loi. La Banque Canadian Tire avance que le syllogisme juridique des requérantes est mal fondé et qu'il n'y aurait pas de rapport juridique entre les allégations de la requête et les conclusions recherchées en vertu des articles 8 ou 272 de la loi. Or, la jurisprudence est loin d'être unanime sur l'application de l'article 272 à titre de recours sanctionnant des pratiques interdites de commerce. Dans ces circonstances, la prétention des requérantes est sérieuse. Enfin, le recours soulève des questions de droit ou de fait similaires ou connexes. Les questions essentielles en litige sont communes et pourront commodément faire l'objet d'un examen collectif par le juge chargé d'entendre le recours. Une limite de temps doit être prévue dans la description du groupe pour éviter que celui-ci ne soit trop large. Le recours est prescrit pour la période antérieure au 1er octobre 2001.