en bref
La demanderesse, qui croyait qu'elle devait acheter les produits offerts par Sélection du Reader's Digest pour améliorer ses chances de gagner aux concours publicitaires organisés par celle-ci, a droit à une réduction substantielle de ses obligations; en effet, compte tenu de ses faibles revenus, ces achats, d'une valeur totale de plus de 7 000 $, ont un caractère subjectivement lésionnaire.
Résumé de l'affaire
Requête en réclamation d'une somme d'argent (7 000 $). Accueillie en partie (3 500 $).
En 2004, le frère de la demanderesse, qui était alors âgée de 75 ans, l'a abonnée à la revue de la défenderesse, Sélection du Reader's Digest. Celui-ci croyait que ses chances de gagner aux concours publicitaires organisés par la défenderesse étaient très bonnes et il a incité la demanderesse à faire de même. Dans les années qui ont suivi, cette dernière a reçu une centaine d'offres l'invitant à participer à de tels concours publicitaires. Tout comme son frère, elle croyait qu'elle devait acheter les produits offerts par la défenderesse pour améliorer ses chances de gagner. Pendant quatre ans, elle a donc régulièrement acheté divers biens, principalement des livres et des disques compacts, au coût total de 7 553 $. Or, elle n'utilisait jamais les produits qu'elle achetait, car elle n'en avait aucunement besoin. En fait, elle ne lit que très peu et n'écoute presque jamais de musique. La fille de la demanderesse considère que les pratiques commerciales utilisées par la défenderesse ont permis à cette dernière d'abuser de la position de faiblesse de sa mère. La demanderesse réclame donc 7 000 $ en remboursement d'une partie des biens qu'elle a achetés de la défenderesse entre 2004 et 2008. Pour sa part, la défenderesse prétend que ses concours publicitaires respectent la loi et que la demanderesse n'avait aucune obligation d'acheter les biens offerts en vente pour participer à ses concours et gagner un prix.
résumé de la Décision
Afin de trancher le litige, il est suffisant de le considérer sous l'angle du droit contractuel et d'appliquer les articles 8 et 9 de la Loi sur la protection du consommateur. Pour que le tribunal puisse intervenir, la disproportion entre les prestations doit être sérieuse, mais il n'est pas nécessaire que le consommateur prouve qu'il a subi de la pression avant de contracter. Par ailleurs, dans l'appréciation du consentement donné par ce dernier, il faut tenir compte des circonstances dans lesquelles le contrat a été conclu ainsi que des avantages qui résultent de celui-ci pour le consommateur. Ainsi, si la preuve établit que la situation financière du consommateur rendait son obligation excessive, abusive ou exorbitante, il y aura lieu de présumer que le commerçant n'aurait pas réalisé une telle vente s'il s'était adéquatement renseigné et de conclure qu'il doit subir les conséquences de sa négligence (Gareau Auto inc. c. Banque canadienne impériale de commerce (C.A., 1989-04-03), SOQUIJ AZ-89011489, J.E. 89-721, [1989] R.J.Q. 1091). En l'espèce, les prestations respectives des parties n'étaient pas disproportionnées au point d'équivaloir à une exploitation de la demanderesse (lésion objective), mais elles imposaient toutefois à celle-ci une obligation excessive ou exorbitante eu égard à sa condition et aux avantages qu'elle retirait de chacun des achats (lésion subjective). En effet, elle n'utilisait jamais les biens qu'elle achetait et elle croyait fermement que ces achats lui donnaient la chance de gagner un prix important en argent. De plus, compte tenu de ses faibles revenus, on peut facilement inférer ou présumer que les achats qu'elle a effectués ont créé une pression financière additionnelle qui était démesurée, et que ces achats ont un caractère subjectivement lésionnaire. La demanderesse est toutefois incapable de remettre à la défenderesse les biens qu'elle lui a achetés, car elle ne les a plus en sa possession. Puisque la défenderesse a multiplié les offres à la demanderesse sans jamais se renseigner sur sa condition ou sa capacité financière, il y a lieu de réduire substantiellement les obligations de cette dernière, qui a droit à un remboursement de 3 500 $.