Résumé de l'affaire
Appels d'un jugement de la Cour supérieure ayant rejeté la requête en réclamation de dommages-intérêts de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont (HMR) et accueilli en partie celle de Buesco Construction inc. Les appels de HMR sont accueillis en partie; les appels incidents de Buesco et l'appel de la Société québécoise des infrastructures sont rejetés.
HMR a confié un contrat à Buesco pour la construction d'un centre ambulatoire. Il a par la suite résilié ce contrat en invoquant des manquements graves de la part de l'entrepreneur, contre lequel il a intenté un recours en dommages-intérêts. Le juge a conclu que l'absence de méthode pour déposer les étais sur un sol gelé constituait un manquement grave de la part de Buesco, ce qui permettait à HMR de résilier le contrat, mais qu'elle n'avait pas commis de faute en laissant geler le sol sur lequel devait être coulé du béton ni dans la production des échéanciers. Toutefois, puisque, selon lui, HMR avait abusé de ses droits dans le cours de l'exécution du contrat, notamment en contrevenant à son obligation de renseignement, le juge a rejeté le recours de HMR et accueilli en partie celui de Buesco pour manquements aux obligations contractuelles.
Décision
Le juge a erré en concluant que la faute par Buesco d'avoir laissé geler le sol et son incapacité à produire un échéancier conforme à ses engagements contractuels ne constituaient pas des manquements suffisamment graves pour donner ouverture à la clause de résiliation-sanction prévue au contrat. Il a également commis une faute en concluant que HMR avait commis un abus de droit. La preuve ne permettait pas de conclure que HMR avait rompu une entente selon laquelle il s'engageait à transmettre à Buesco une directive rédigée par des ingénieurs permettant l'élaboration d'une méthode de construction pour travailler sur un sol gelé. De plus, le jugement ne précise pas la nature de l'information technique dont aurait été privée Buesco. Par ailleurs, même si HMR n'était pas autorisé à retenir un paiement dû à l'entrepreneur, il s'agit d'une faute contractuelle qui ne peut être assimilée à une conduite abusive. Tant la loi que les clauses contractuelles permettaient à HMR de résilier le contrat. Les dommages-intérêts accordés doivent être révisés: la réclamation de HMR est établie à 3 636 133 $, alors que l'indemnité accordée à Buesco est réduite à 1 510 545 $. Enfin, les dispositions du nouveau Code de procédure civile n'ont pas de portée rétroactive, même à l'égard d'un jugement de première instance rendu avant le 1er janvier 2016 qui, à défaut d'être définitif, n'en est pas moins final. Même si les dépens ne sont dus qu'au moment du jugement définitif, leur détermination doit se faire selon ce qui aurait dû être ordonné au moment du prononcé du jugement final, et ce, conformément au droit qui existait alors. Par conséquent, puisque HMR ne s'est pas conduit de manière abusive et que sa demande contre Buesco est accueillie jusqu'à concurrence de 3 636 133 $, les dépens doivent être adjugés en conséquence selon le tarif applicable à l'époque, mais en faveur de HMR.