Résumé de l'affaire

Appels d'un jugement de la Cour supérieure ayant accueilli en partie une demande d'injonction, annulé un avis de résiliation de contrat et condamné l'appelante à payer 6 134 $ à l'intimé. Appel principal accueilli et appel incident rejeté.

En 1998, l'intimée Automobiles Duclos inc. exploitait une concession d'automobiles Ford. À la suite d'une vérification, l'appelante Ford lui a reproché de lui avoir présenté des réclamations fausses et frauduleuses. En 1999, lorsqu'elle a voulu procéder à une vérification plus complète des activités d'Automobiles, celle-ci a restreint son accès aux documents et a contesté ses procédures d'arbitrage. Finalement, se fondant sur les fausses réclamations et le refus d'Automobiles de permettre l'examen de ses livres le 29 janvier 2001, Ford lui a transmis un avis de résiliation de 15 jours. Automobiles a répliqué par un recours en injonction, en annulation de l'avis de résiliation et en dommages-intérêts pour atteinte à sa réputation. Ford a intenté à son tour un recours en injonction, en remboursement de sommes payées en trop et en dommages-intérêts. En première instance, le juge a annulé l'avis de résiliation, a accueilli la demande d'injonction d'Automobiles et, après avoir opéré compensation entre les sommes que les parties se devaient, a condamné Ford à payer 6 134 $ à celle-ci. Il a rejeté les autres demandes de Ford, notamment celle en dommages-intérêts contre l'intimé Louis-Philippe Duclos en raison de l'absence de preuve de mauvaise foi de celui-ci. Il a conclu que l'avis de résiliation de 15 jours était abusif et qu'il résultait d'une clause elle-même abusive. En appel, Ford soutient que la violation de cette clause par Automobiles lui permettait de résilier la convention de concessionnaire. Quant aux intimés, ils réclament 230 000 $ en dommages-intérêts et en dommages exemplaires pour l'atteinte à leur réputation, l'abus de droit et de procédure ainsi que les inconvénients subis.

Décision

La convention de concessionnaire conclue entre les parties constituait un contrat d'adhésion. Ford pouvait y mettre fin pour l'une des causes prévues à l'article 17 b) 2) en donnant un avis préalable de 15 jours notamment si le concessionnaire lui avait fait de fausses réclamations. Cette clause n'est pas abusive. Le fait qu'elle permette au franchiseur de résilier la convention en cas de fraude ne la rend pas excessive ni ne va à l'encontre de la bonne foi. La fraude ne constitue pas une cause bénigne de résiliation. Ce manquement grave compromet la confiance nécessaire à la relation d'affaires entre les parties. D'ailleurs, la convention établit une distinction entre la fraude et les autres manquements pour lesquels elle prévoit des mesures correctives. D'autre part, le juge de première instance ne pouvait écarter la preuve de l'existence de fausses réclamations. Sa conclusion quant à l'abus de droit de Ford découle d'une erreur relative à la norme juridique applicable au comportement de celle-ci. Cette erreur a entaché son analyse de la preuve. Convaincu de l'abus, il a apprécié négativement la preuve de Ford et a excusé les gestes d'Automobiles. Il a ainsi commis des erreurs de droit manifestes et dominantes qui justifient l'intervention de la Cour. Ford a prouvé l'existence de fausses réclamations et, par conséquent, son avis de résiliation était fondé. Peu importe le nombre ou la valeur des réclamations, il s'agissait d'une importante rupture de contrat qui ne saurait être neutralisée par le comportement subséquent de Ford. De toute façon, celle-ci n'a commis aucun abus de droit. Son appel est accueilli et la convention de concessionnaire est résiliée. L'appel incident doit être rejeté puisque la partie du jugement de première instance qui traite de la réclamation en dommages-intérêts des intimés ne comporte pas d'erreur justifiant l'intervention de la Cour.


Dernière modification : le 30 juillet 2022 à 19 h 01 min.