Signalement(s)

En exigeant de l'appelant qu'il démontre que chacun des membres du groupe avait subi le même préjudice pour conclure à la présence de questions identiques, similaires ou connexes, le juge de première instance a erré puisque le fait de reconnaître l'existence de questions communes suffisait à franchir le seuil peu élevé permettant de satisfaire au critère énoncé à l'article 575 (1) C.P.C.

Le juge de première instance n'était pas fondé à rejeter la demande de modification de la demande en autorisation d'exercer une action collective puisque la reformulation de la réclamation de dommages-intérêts avait un rapport indéniable avec la demande initiale.

L'appelant est autorisé à exercer une action collective au nom des personnes qui ont versé un dépôt pour l'achat d'une unité de copropriété divise dans le projet Harmonia Cité-Nature (phase IV).

Les articles 219 et 228 de la Loi sur la protection du consommateur font partie des exceptions, prévues à son article 6.1, au principe d'inapplicabilité de cette loi au contrat ayant pour objet la vente, la location ou la construction d'un immeuble.

Résumé

Appel de 2 jugements de la Cour supérieure ayant rejeté une demande de modification d'une demande pour autorisation d'exercer une action collective et ayant rejeté cette demande pour autorisation. Accueilli quant à la demande de modification et accueilli en partie quant à la demande d'autorisation.

L'appelant désire exercer une action collective contre les intimées à titre de promoteurs ou de développeurs immobiliers du projet d'habitation résidentielle Harmonia Cité-Nature (phase IV), au nom de toutes les personnes ayant versé un dépôt pour l'achat d'unités dans ce projet. La demande de modification concernait l'ajout d'une référence au gain manqué résultant de l'annulation illégale des contrats de vente d'unités alors que la demande initiale de dommages-intérêts visait à compenser les coûts additionnels imposés aux membres pour acheter une copropriété divise dans le même quartier. Le juge de première instance a conclu qu'il s'agissait d'une cause d'action nouvelle qui n'avait pas été couverte par la défense dans son plan d'argumentation. Quant à la demande en autorisation, le juge de première instance a conclu que le critère énoncé à l'article 575 paragraphe 1 du Code de procédure civile (C.P.C.) n'était pas rempli en l'absence d'une démonstration d'un dommage commun subi par l'ensemble des membres du groupe, alors qu'un tel dommage ne pouvait être inféré.

Décision

Le droit à la modification, prévu à l'article 206 C.P.C., doit recevoir une interprétation large et libérale et ce n'est qu'exceptionnellement qu'une modification sera refusée. En l'espèce, aucun des critères d'exception prévus à l'article 206 C.P.C. et permettant de justifier le refus de la modification n'est rempli. La reformulation de la réclamation en dommages-intérêts en fonction du gain manqué a ici un rapport indéniable avec la demande initiale et le préjudice allégué découle des mêmes faits. La tardiveté à demander la modification ne saurait faire obstacle à la modification proposée, d'autant moins que les intimées n'ont jamais soutenu qu'elle entraînerait le report de l'audience ou quelque retard que ce soit dans le déroulement de l'instance.

 

Quant à la demande en autorisation, en exigeant de l'appelant qu'il démontre que chacun des membres du groupe avait subi le même préjudice pour conclure à la présence de questions identiques, similaires ou connexes, le juge de première instance a confondu les critères énoncés aux articles 575 paragraphe 1 et 575 paragraphe 2 C.P.C. Le fait de reconnaître l'existence de questions communes suffisait à franchir le seuil peu élevé permettant de satisfaire au critère se trouvant à l'article 575 paragraphe 1 C.P.C. Il importe peu que les membres du groupe aient subi le même préjudice puisqu'une fois la question de la faute des intimées décidée, les parties auront réglé une partie non négligeable du litige. Par ailleurs, le juge de première instance n'a pas commis d'erreur en concluant à l'absence d'apparence de droit à l'égard de l'intimée Elad Canada inc. Enfin, le juge de première instance a eu tort de conclure qu'aucune des dispositions de la Loi sur la protection du consommateur invoquées par l'appelant ne figurait parmi les exceptions mentionnées à l'article 6.1 de la loi à l'égard de la règle énoncée à l'article 6, qui exclut l'application de cette loi au contrat ayant pour objet la vente, la location ou la construction d'un immeuble. En effet, les articles 219 et 228 de la loi qu'invoque l'appelant figurent bel et bien au titre II, auquel fait expressément référence l'article 6.1 de la loi. Il n'est toutefois pas utile ni nécessaire pour décider du sort de la demande en autorisation de déterminer dans quelle mesure ces dispositions trouvent application.

Historique

Instance précédente : Juge Donald Bisson, C.S., Montréal, 2022-10-04, 500-06-001158-217, 2022 QCCS 3618, SOQUIJ AZ-51884347, 2022EXP-2677


Dernière modification : le 14 août 2024 à 14 h 49 min.