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Une agence de recouvrement et un agent sont reconnus coupables d'avoir contrevenu à l'article 4 de la Loi sur le recouvrement de certaines créances en communiquant avec la mère d'un débiteur dans le but de recouvrer une créance.

Pour avoir communiqué avec la mère d'un débiteur dans le but de recouvrer une créance, une agence de recouvrement et un agent sont reconnus coupables d'avoir contrevenu à l'article 4 de la Loi sur le recouvrement de certaines créances.

Résumé

Accusations d'avoir contrevenu à l'article 4 de la Loi sur le recouvrement de certaines créances. Déclarations de culpabilité.

Alors qu'il travaillait comme agent de recouvrement pour la défenderesse, le défendeur a appelé au domicile de Nadeau pour parler au fils de celle-ci (le débiteur), mais elle l'a informé qu'il n'habitait plus avec elle depuis quelques années. Le défendeur lui a alors demandé de dire à son fils de le rappeler. Lorsque Nadeau a voulu savoir qui il était, le défendeur a répondu qu'il connaissait bien son fils et que celui-ci lui avait donné son numéro de téléphone en référence. La communication a ensuite pris fin. Intriguée par cet appel, Nadeau a fait des recherches sur Internet à partir du numéro de téléphone indiqué sur son afficheur. Elle a alors appris qu'il s'agissait d'une agence de recouvrement. Le lendemain, elle a reçu un deuxième appel du défendeur. Elle lui a immédiatement mentionné qu'elle allait porter plainte contre lui parce qu'il n'avait pas le droit de communiquer avec elle, puis elle a mis fin à l'appel. Une plainte a été déposée auprès de l'Office de la protection du consommateur. Le poursuivant reproche au défendeur et à l'agence de recouvrement défenderesse d'avoir communiqué avec un membre de la famille d'un débiteur dans le but de recouvrer une créance, contrevenant ainsi à l'article 4 de la loi. Les défendeurs soutiennent avoir utilisé le numéro de la mère du débiteur, car ce dernier le leur avait volontairement fourni à titre de coordonnées secondaires. Ainsi, en composant ce numéro, le défendeur cherchait à communiquer avec le débiteur lui-même et non avec sa mère. Les défendeurs prétendent aussi que ces appels téléphoniques avaient pour but de joindre le débiteur et non de recouvrer une créance.

Décision

La défenderesse, par l'intermédiaire de son agent de recouvrement, a contrevenu à l'article 4 de la loi en communiquant avec la mère du débiteur. La Loi sur le recouvrement de certaines créances vise à interdire de communiquer avec des personnes de l'entourage d'un débiteur, lesquelles, malgré leur lien avec celui-ci, n'ont rien à voir avec la dette que celui-ci a contractée et ont le droit de ne pas être inquiétées par les démarches entreprises en vue de son recouvrement. En l'espèce, le débiteur a fait preuve de collaboration après avoir reçu un avis de recouvrement.

Lorsque le défendeur lui a demandé un deuxième numéro de téléphone pour le joindre, le débiteur lui a clairement indiqué qu'il n'y en avait aucun autre que celui qu'il lui avait déjà donné. Malgré tout, le défendeur a insisté en réclamant expressément le numéro d'un proche «au cas où on ne pourrait le joindre». Ce n'est qu'à la suite de cette demande que le débiteur a fourni un second numéro en précisant qu'il s'agissait de celui de sa mère, avec laquelle il n'habitait plus. Le débiteur étant de toute évidence dans une position de vulnérabilité par rapport à l'agent de recouvrement, il est d'ailleurs permis de se questionner sur le caractère volontaire et éclairé de la transmission de ces renseignements. En outre, le législateur n'a pas souhaité que le débiteur puisse validement, par son seul consentement, renoncer au droit de sa mère de bénéficier de la quiétude que vise à protéger la loi. Le défendeur ne pouvait raisonnablement croire que le débiteur partageait ce numéro de téléphone avec sa mère et que, en le composant, il communiquait directement avec lui. Lors du premier appel, la mère du débiteur a d'ailleurs mentionné au défendeur que son fils n'habitait plus avec elle depuis quelques années. Or, cela n'a pas empêché ce dernier de la rappeler à ce même numéro le lendemain. À partir du moment où il connaît les coordonnées pour joindre un débiteur, l'agent de recouvrement, dans l'exercice de sa fonction qui consiste à recouvrer une créance, ne peut plus communiquer avec un proche du débiteur, et ce, d'aucune façon. L'appel à des tiers ne peut servir de moyen ou de solution de rechange pour «joindre» le débiteur. Une seule communication avec un proche suffit d'ailleurs pour conclure à la commission de l'infraction prévue à l'article 4 de la loi.

Sans égard à la brièveté des entretiens qui ont eu lieu, les appels au numéro de téléphone de la mère du débiteur constituent des «communications» au sens de la loi. Cela suit d'ailleurs la position du juge dans Directeur des poursuites criminelles et pénales c. MJR Services de collection limitée (C.Q., 2017-07-28), 2017 QCCQ 8639, SOQUIJ AZ-51415694. Il ne fait aucun doute que les appels en cause s'inscrivent dans le processus global de recouvrement de la créance du débiteur.

Enfin, les défendeurs n'ont pas pris toutes les précautions raisonnables pour tenter d'éviter de commettre l'infraction reprochée. En suggérant d'emblée à un débiteur de fournir les coordonnées d'un proche comme «numéro de contact», ils ont fait preuve d'une désinvolture et d'un laxisme qui ne s'apparentent aucunement à la diligence qui est attendue des professionnels du recouvrement à l'égard des prescriptions de la loi.

Historique

Suivi : Détermination de la peine (C.Q., 2024-01-25) 540-61-129520-224 et 540-61-129521-222.


Dernière modification : le 21 août 2024 à 0 h 52 min.