Résumé de l'affaire

Contestation d'une décision de l'Office de la protection du consommateur. Rejetée.

Le requérant exploite un commerce de prêteur d'argent et détient un permis de la Ville de Québec à cette fin. En décembre 1999, ayant appris la nécessité d'obtenir un permis de l'Office, il a déposé une demande. Une inspection administrative effectuée par le Service de police de la Ville de Québec a révélé que les contrats utilisés ne respectaient pas les dispositions de la Loi sur la protection du consommateur (L.P.C.) et du Règlement d'application de la Loi sur la protection du consommateur et qu'ils imposaient un taux d'intérêt égal ou supérieur à 264 % annuellement. L'Office a refusé le permis en se basant sur l'article 325 L.P.C., affirmant qu'à son avis il existait des motifs raisonnables de croire que ce refus était nécessaire pour assurer l'exercice honnête et compétent des activités visées. Le requérant conteste cette décision et prétend démontrer qu'un commerce de prêt sur gage ne peut être rentable avec un taux d'intérêt mensuel de seulement 5 % compte tenu des frais élevés qu'il doit supporter. Il allègue qu'il doit payer des frais d'exploitation, tels le loyer, les assurances et les taxes, de même que l'entreposage des biens donnés en garantie, et soutient que ceux-ci doivent être inclus dans les frais de crédit.

Résumé de la décision

Le pouvoir d'intervention du Tribunal administratif du Québec est balisé par l'article 341 L.P.C., qui lui interdit de substituer son appréciation de l'intérêt public ou de l'intérêt du public à celle de l'Office. L'article 66 L.P.C. vise tous les contrats de crédit. Les contrats conclus par le requérant s'intitulent «vente sous condition résolutoire», mais ces contrats de vente à réméré qui ont pour objet de garantir un prêt d'argent constituent, par l'application de l'article 1756 du Code civil du Québec, des contrats de crédit au sens de l'article 66 L.P.C. Quant aux frais de crédit, l'article 70 L.P.C. détermine ce qui les compose et l'emploi du mot «notamment» ainsi que la diversité des frais inclus dans la nomenclature indiquent que le législateur a voulu que l'ensemble des coûts reliés au prêt soient inclus. Par conséquent, les frais indiqués au contrat sont des frais de crédit qui constituent un taux de crédit demandé et qui doivent se traduire sous la forme d'un pourcentage annuel. La jurisprudence a établi qu'il est normal que les prêteurs qui prennent des risques plus grands imposent des taux d'intérêt plus élevés. Le Tribunal constate que les sommes prêtées sont minimes et que ces prêts nécessitent un examen et un entreposage des biens. Il est certain que, pour être rentable, le taux de crédit doit être supérieur. Toutefois, parce que le prêteur prend possession d'un bien en garantie, le risque d'encourir une perte est faible puisque, généralement, le non-recouvrement du prêt est compensé par la vente du bien. Le Tribunal s'interroge quant à un taux de crédit qui ne serait pas abusif ou exorbitant. Le requérant le fixe à 22 % par mois mais, dans l'état actuel du droit, les taux exigés sont supérieurs au taux d'intérêt de 60 % par an permis par le Code criminel. Par ailleurs, le prêt sur gage étant une hypothèque mobilière avec dépossession, les formalités d'exercice des droits hypothécaires prévues au Code civil du Québec, bien que d'ordre public, ne sont pas respectées. Ce commerce contrevient donc tant à la Loi sur la protection du consommateur qu'au Code civil du Québec puisque c'est sans formalités que le commerçant devient propriétaire du bien et le vend au tiers. En 1983, le législateur canadien a abrogé la Loi sur les prêteurs sur gages et, au Québec, les dispositions du Code civil du Bas Canada en cette matière ont été abrogées par l'adoption du nouveau code. Il n'y a donc plus d'encadrement législatif particulier aux prêts sur gage. Le Tribunal constate que, dans son analyse, l'Office n'a pas retenu la prétention du requérant selon laquelle ce type de commerce serait socialement indispensable afin de permettre aux plus démunis d'avoir accès au crédit. Il appartenait à l'Office d'apprécier les éléments de l'intérêt public dont elle voulait tenir compte, et le Tribunal est lié par cette décision; il ne peut considérer l'accès au crédit par les plus pauvres. Le recours doit être rejeté.

 


Dernière modification : le 20 juillet 2001 à 17 h 25 min.