Résumé de l'affaire

Action en dommages-intérêts contre une agence de voyages. Accueillie en partie.

Après 23 années passées ici, le demandeur, natif du Viêt-nam, a voulu visiter sa famille dans son pays d'origine, accompagné de sa conjointe, la codemanderesse. Ils se sont adressés à la défenderesse. Le demandeur a versé la somme de 9 890 $, qui couvrait l'obtention des visas, les billets d'avion, les hôtels et une visite guidée de sept jours au Viêt-nam. L'itinéraire comprenait 5 jours à Hongkong, 6 jours à Bangkok, 30 jours au Viêt-nam et 4 jours dans une île des Philippines. Lors de leur départ, ils n'avaient toujours pas le visa nécessaire pour entrer au Viêt-nam. Le directeur de la défenderesse les a informés que leurs visas leur seraient remis à Manille, au comptoir de la compagnie aérienne nationale philippine. À leur arrivée à Manille, première escale de leur voyage, ils n'ont pas obtenu les visas et leurs noms n'étaient pas enregistrés pour le vol vers Hongkong. Ils ont ensuite poursuivi leur itinéraire, tentant, en vain, de communiquer avec les représentants de la défenderesse à Montréal afin d'être certains d'obtenir leurs visas avant leur départ pour le Viêt-nam. Ils ont aussi envoyé un télex à la défenderesse pendant qu'ils étaient à Bangkok. Ils se sont embarqués pour le Viêt-nam en espérant que les visas les attendraient à leur arrivée. Ils ne s'y trouvaient pas. La famille élargie du demandeur, dont certains membres venaient de localités éloignées, était venue l'accueillir. Les demandeurs n'ont pu franchir les douanes et ont été expulsés du pays par des militaires armés, qui les ont escortés jusqu'à un avion, qui les a ramenés à Bangkok. Ils ont dû payer le prix de ce vol. De retour à Bangkok, ils ont pu parler à un représentant de la défenderesse et, après différentes démarches, il a été entendu qu'ils devaient retourner à Manille chercher leurs visas. Ils ont payé les billets d'avion pour se rendre à cet endroit et ensuite retourner au Viêt-nam. Ils allèguent que nulle part les hôtels dans lesquels ils ont logé ne correspondaient aux descriptions faites par la défenderesse. La visite guidée de sept jours au Viêt-nam s'est avérée totalement inacceptable, au point où les demandeurs ont abandonné le circuit après quatre jours. Enfin, ils se plaignent de leur séjour dans une île des Philippines en raison de l'endroit où était situé l'hôtel et des mauvaises conditions générales de ce voyage, en plus de la perte de leurs bagages.

 

Résumé de la décision

On assimile l'agent de voyages à un commerçant à l'égard du consommateur, et la Loi sur la protection du consommateur s'applique en l'espèce. La défenderesse avait une obligation de résultat à l'endroit des demandeurs. Bien qu'elle ne perçoive pas d'honoraires pour l'obtention des visas, il s'agit d'un service nécessaire et indispensable à la vente de voyages au Viêt-nam. Lorsque la défenderesse accepte le paiement d'un voyage pour cette destination, son obligation quant à l'obtention des visas est une obligation de résultat car, dans ce cas, visa et voyage sont indissociables. La défenderesse se décrit comme une spécialiste des voyages en Asie et elle s'est comportée en l'espèce comme une débutante. Son inertie lorsqu'elle a reçu le télex des demandeurs, en provenance de Hongkong, alors qu'il lui restait encore six jours pour faire le nécessaire afin qu'ils obtiennent leurs visas avant de partir pour le Viêt-nam, est inexcusable. De plus, elle aurait dû leur donner des conseils, avant leur départ de Montréal, au cas où les visas ne seraient pas disponibles à Manille; elle ne les a jamais informés qu'ils pouvaient obtenir des visas temporaires en 48 heures. La défenderesse agissait non pas seulement à titre d'intermédiaire dans la vente de voyages, mais aussi à titre d'entrepreneur puisqu'elle organisait le voyage des demandeurs et se chargeait d'obtenir pour eux les visas. En l'absence de résultat, sa faute est présumée. La visite guidée au Viêt-nam était d'une qualité inacceptable. Là encore, la défenderesse a failli à son obligation. Le rapport qualité-prix des hôtels dans lesquels les demandeurs ont logé à Hongkong, à Bangkok et sur une île des Philippines est cependant acceptable. Quant aux retards et à la perte des bagages, ils relèvent de la responsabilité des transporteurs aériens et non de celle de la défenderesse. Les dommages sont constitués des frais occasionnés par l'expulsion du Viêt-nam, les hôtels, repas et billets d'avion pour obtenir les visas et revenir au Viêt-nam (4 263 $), le remboursement de la visite guidée au Viêt-nam (750 $) et une réduction du coût du voyage de 4 000 $ vu les jours de vacances perdus, les tracas, l'humiliation et les souffrances subis à différents moments du voyage. De plus, afin de prévenir une négligence aussi grossière de la part de la défenderesse à l'avenir, la reconnaissance de dommages exemplaires est justifiée. Le montant de ces dommages doit tenir compte de la capacité de payer de la défenderesse afin d'obtenir l'effet dissuasif désiré. Compte tenu du grand nombre de voyages que vend la défenderesse, une somme de 5 000 $ pour chacun des deux demandeurs est accordée.


Dernière modification : le 11 avril 1996 à 0 h 00 min.