En bref

La juge de première instance n'a pas commis d'erreur en concluant que l'interdiction de faire des représentations fausses ou trompeuses visée par les articles 219 et 227.1 de la Loi sur la protection du consommateur s'applique tout aussi bien à la phase contractuelle qu'à la phase précontractuelle.

Bien que les clauses prévues au contrat de l'un des appelants ne soient pas trompeuses et que sa réclamation ait donc été rejetée, cela ne l'empêche pas d'agir en qualité de représentant des membres d'un recours collectif qui soulèvent des questions similaires.

La juge de première instance n'a pas commis d'erreur en condamnant deux commerçants à payer chacun 150 000 $ aux membres de recours collectifs à titre de dommages punitifs en raison des représentations fausses ou trompeuses contenues dans leurs contrats visant le financement de l'achat ou de la location d'un véhicule.

Résumé de l'affaire

Appels de jugements de la Cour supérieure ayant accueilli en partie deux recours collectifs en réclamation de dommages-intérêts ainsi que de dommages punitifs et en ayant rejeté deux autres. Rejetés.

Quatre recours collectifs ont été intentés par des consommateurs qui ont financé l'achat ou la location de leur véhicule et qui ont payé des frais pour la publication de leur contrat au registre des droits personnels et réels mobiliers. Il s'agissait d'une somme globale qui comprenait à la fois le montant prévu au Tarif des droits relatifs au registre des droits personnels et réels mobiliers et des frais de gestion payés à un tiers pour effectuer les inscriptions. Selon les appelants, la description de ces frais dans les contrats constitue une représentation fausse ou trompeuse au sens de la Loi sur la protection du consommateur. Les recours collectifs intentés contre la Compagnie de services de financement automobile Primus Canada et la Banque Royale du Canada ont été rejetés, alors que General Motors Acceptance Corporation du Canada Ltée (GMAC) et Nissan Canada Finance, Division de Nissan Canada inc., ont été condamnées à payer chacune des dommages punitifs de 150 000 $. La juge de première instance a toutefois refusé d'ordonner le remboursement aux membres des sommes payées en sus des droits exigés au tarif puisque ces derniers ont admis qu'ils auraient tout de même adhéré au contrat n'eussent été ces fausses représentations. Les appelants réclament des dommages compensatoires et des dommages punitifs totalisant plus de 80 millions de dollars. En appel incident, GMAC et Nissan reprochent à la juge d'avoir commis une erreur de droit en appliquant le titre II (art. 215 à 253) de la Loi sur la protection du consommateur au recours contractuel entre un consommateur et un commerçant. Ils contestent également l'attribution de dommages punitifs.

Résumé de la décision

M. le juge Schrager: La juge de première instance n'a pas commis d'erreur en concluant que l'article 227.1 de la loi s'applique non seulement aux représentations précontractuelles, mais aussi à la phase contractuelle. C'est à bon droit qu'elle a ajouté que le législateur ne pouvait avoir eu l'intention de limiter l'interdiction de faire des représentations fausses ou trompeuses uniquement à la phase précontractuelle. Un contrat peut traiter des droits et obligations des parties, mais il peut aussi très bien inclure une représentation. Cette conclusion ne va pas à l'encontre de Richard c. Time Inc. (C.S. Can., 2012-02-28), 2012 CSC 8, SOQUIJ AZ-50834275, 2012EXP-836, J.E. 2012-469, [2012] 1 R.C.S. 265. La juge n'a pas erré en droit en appliquant l'article 218 de la loi. La règle de l'impression générale n'est pas incompatible avec les règles d'interprétation des contrats. Il n'y a pas lieu d'intervenir à l'égard de la conclusion selon laquelle l'impression générale qui se dégage de certaines clauses est que les droits exigibles en vertu du tarif pour publier au registre correspondent au montant indiqué, ce qui n'est pas conforme à la réalité. En outre, contrairement à ce que prétendent les commerçants, il n'est pas nécessaire d'appliquer la règle de minimis prévue à l'article 63 du Règlement d'application de la Loi sur la protection du consommateur, puisque ce n'est pas ce que contestaient les appelants. Par ailleurs, cesderniers pouvaient choisir d'intenter un recours fondé sur l'article 272 plutôt que sur l'article 271 de la loi, et ce, même si cela empêche les commerçants d'invoquer l'absence de préjudice en défense. Par contre, la juge a correctement appliqué les critères établis dans Richard en concluant que les appelants ne pouvaient bénéficier de la présomption absolue de préjudice se trouvant à l'article 253 de la loi, car il n'existait pas une proximité suffisante entre le contenu de la représentation et le bien ou le service visé par le contrat. En effet, ils auraient adhéré au contrat de la même façon si les frais avaient été ventilés. D'autre part, bien que les clauses prévues au contrat de l'un des appelants ne soient pas trompeuses et que sa réclamation ait de ce fait été rejetée, cela ne l'empêche pas d'agir en qualité de représentant des membres d'un recours collectif qui soulèvent des questions similaires. Enfin, il n'y a pas lieu d'intervenir à l'égard de la condamnation à des dommages punitifs prononcée à l'encontre de GMAC et Nissan. La somme accordée ne doit pas excéder ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive, qui est d'encourager GMAC et Nissan à clarifier le libellé de leurs contrats, et le mode de recouvrement du recours collectif ne devrait pas avoir d'influence sur celle-ci. Le peu de gravité de la violation milite également en faveur du maintien de la somme accordée.


Dernière modification : le 20 février 2015 à 22 h 33 min.