en bref

La Banque Amex du Canada a contrevenu à l'article 12 de la Loi sur la protection du consommateur; par conséquent, elle doit rembourser les frais de conversion qu'elle a perçus entre 1993 et 2003 des détenteurs de cartes de crédit qui sont des consommateurs.

 Les frais de conversion facturés aux détenteurs de cartes de crédit étant distincts du taux de change, ces derniers n'avaient pas l'obligation de les payer.

Les articles 12, 219 et 272 de la Loi sur la protection du consommateur ne sont pas inconstitutionnels à l'égard des cartes de crédit et des cartes de paiement émises par des banques en raison des doctrines de l'exclusivité des compétences ou de la prépondérance fédérale.

 Les titulaires de cartes Amex n'étaient nullement tenus de payer les frais de conversion, et les dispositions relatives à la réception de l'indu s'appliquent; en conséquence, en application de l'article 1699 C.C.Q., Amex doit restituer aux membres du groupe qui ne sont pas des consommateurs les frais de conversion qu'ils ont payés.

Les frais de conversion perçus par la Banque Amex du Canada ayant été payés par erreur par les titulaires de cartes de crédit, ceux qui ne sont pas des consommateurs sont en droit d'en obtenir le remboursement.

 

Résumé de l'affaire

Pourvoi à l'encontre d'un arrêt de la Cour d'appel du Québec ayant infirmé en partie une décision de la Cour supérieure. Rejeté.

Les cartes de crédit et les cartes de paiement d'Amex permettent à leurs titulaires de faire des achats en devises étrangères. Des frais de conversion s'appliquent à ces opérations, c'est-à-dire qu'un pourcentage de la somme convertie est exigé en sus pour ce service de conversion. La Loi sur la protection du consommateur du Québec impose différentes règles sur la teneur et la mention des frais et droits dans les contrats de crédit variable. Les frais de conversion n'étaient pas indiqués dans les conventions régissant l'utilisation des cartes émises par Amex entre 1993 et 2003. A., le représentant des demandeurs, a intenté un recours collectif contre Amex pour obtenir le remboursement des frais de conversion imposés par cette institution sur les opérations par carte de crédit ou par carte de paiement en devises étrangères au motif que ces frais contrevenaient aux dispositions de la loi et du Code civil du Québec (C.C.Q.). Le groupe en cause est composé de consommateurs et de non-consommateurs qui sont titulaires de cartes de crédit ou de cartes de paiement. Amex a fait valoir que la loi était constitutionnellement inapplicable à une banque comme Amex et qu'elle n'était pas tenue au remboursement des frais de conversion. La Cour supérieure a accueilli le recours collectif et a condamné Amex à rembourser les frais de conversion perçus de tous les titulaires de carte entre 1993 et 2003. La Cour d'appel a accueilli l'appel, mais seulement pour annuler les dommages-intérêts punitifs accordés en première instance.

 

résumé de la Décision 

  1. les juges Rothstein et Wagner: Pour les motifs exposés dans l'arrêt connexe Banque de Montréal c. Marcotte (C.S. Can., 2014-09-19), 2014 CSC 55, SOQUIJ AZ-51108752, les dispositions pertinentes de la loi ne sont ni inapplicables ni inopérantes en raison de la doctrine de l'exclusivité des compétences ou de celle de la prépondérance fédérale.

La conclusion du juge de première instance suivant laquelle les frais de conversion étaient distincts du taux de change, et n'en faisaient pas partie, était une conclusion de fait ou, au mieux, une question mixte de fait et de droit, et ne devrait donc pas être modifiée en l'absence d'une erreur manifeste et dominante. En conséquence, Amex a manqué aux obligations mentionnées à l'article 12 de la loi et elle est tenue, en application de l'article 272 c), de rembourser les frais de conversion qu'elle a perçus entre 1993 et 2003 des membres du groupe qui sont des consommateurs, suivant la description qu'en a fait le juge du procès.

La loi ne s'applique pas aux membres du groupe qui ne sont pas des consommateurs. Dans leur cas, Amex est plutôt tenue à la restitution des frais de conversion en application du Code civil du Québec. Les dispositions relatives à la réception de l'indu permettent à quiconque de recouvrer un paiement effectué en trop en imposant à la partie qui l'a reçu indûment l'obligation de le restituer. En l'espèce, la preuve établissait clairement que, de 1993 à 2003, les conventions régissant l'utilisation des cartes ne faisaient aucune mention des frais de conversion parce qu'on ne peut prétendre que de tels frais étaient inclus dans le «taux de change déterminé par Amex». Ainsi, aucune obligation de payer ces frais n'incombait aux titulaires. Tous les paiements des frais de conversion faits par les titulaires de cartes l'ont donc été par erreur et, en conséquence, Amex doit restituer aux membres du groupe qui ne sont pas des consommateurs les frais de conversion qu'ils ont payés. Le pouvoir de ne pas ordonner la restitution que confère le deuxième alinéa de l'article 1699 C.C.Q. dans le cas où celle-ci aurait pour effet d'accorder à l'une des parties un avantage indu est un pouvoir tout à fait exceptionnel qui doit être exercé avec circonspection. En l'espèce, rien ne permet de croire que le juge du procès a eu tort de décliner d'exercer le pouvoir discrétionnaire qui l'habilite à refuser d'ordonner la restitution.


Dernière modification : le 19 septembre 2014 à 20 h 44 min.