en bref

Les défendeurs sont en droit d'obtenir la résiliation du contrat d'entreprise conclu avec la demanderesse pour la rénovation de leur cuisine, car cette dernière a manqué à son devoir de renseignement en ne les avisant pas que leurs armoires comporteraient du bois aggloméré et ne seraient pas entièrement fabriquées en bois massif.

La demanderesse devait révéler à ses clients que les armoires de cuisine ne seraient pas entièrement construites en bois d'érable massif, contrairement à leur exigence; par conséquent, le contrat d'entreprise est résilié et les défendeurs ont droit au remboursement des sommes excédentaires payées ainsi qu'à des dommages-intérêts de 2 000 $ chacun.

 

Résumé de l'affaire

Requête en délaissement forcé d'un immeuble et vente sous contrôle de justice. Rejetée. Demande reconventionnelle en résiliation d'un contrat d'entreprise, en remboursement d'une somme d'argent ainsi qu'en réclamation de dommages-intérêts et d'une indemnité à titre de dommages exemplaires (40 000 $). Accueillie en partie (4 000 $).

Les défendeurs ont conclu un contrat d'entreprise avec la demanderesse pour la rénovation de leur cuisine. Ils désiraient obtenir des armoires en bois d'érable massif et non avec une mince couche de bois appliquée sur du bois aggloméré, et ils ont fait part de cette exigence à la demanderesse. Selon l'estimation préparée par cette dernière, le coût des travaux s'élevait à 38 164 $, taxes en sus, dont 20 240 $ pour les armoires. Le contrat a été signé le 15 octobre 2010 au prix de 39 000 $, taxes en sus, et la description des armoires, identique à celle de l'estimation, mentionnait qu'elles seraient «in maple with opaque finish». Par la suite, des modifications apportées au contrat en ont augmenté le coût de près de 3 000 $. Lors de la livraison des armoires, les défendeurs ont constaté qu'elles n'étaient pas en bois d'érable massif et ils s'en sont plaints à la demanderesse, exigeant qu'elles soient conformes aux spécifications requises. La demanderesse les a mis en demeure d'autoriser l'installation des armoires car, selon elle, les ententes contractuelles avaient été respectées et les travaux avaient été exécutés à plus de 90 %. Les défendeurs ont refusé de donner suite à cette demande et ont formulé une série de griefs sur la qualité des travaux effectués. Faisant fi des commentaires de ces derniers, la demanderesse a pris des mesures pour protéger sa créance et elle présente une requête en délaissement forcé et vente sous contrôle de justice de l'immeuble. Elle admet ne jamais avoir mentionné aux défendeurs qu'il y aurait du bois aggloméré dans les armoires, mais elle reproche à ceux-ci de ne pas avoir agi prudemment et de ne pas avoir posé suffisamment de questions à cet égard. Pour leur part, les défendeurs demandent la résiliation du contrat, la restitution des acomptes payés en trop, des dommages-intérêts de 30 000 $ ainsi qu'une indemnité de 10 000 $ à titre de dommages exemplaires. Selon eux, ils n'auraient jamais contracté avec la demanderesse s'ils avaient su que les armoires ne seraient pas entièrement en bois d'érable massif.

 

résumé de la Décision

En vertu de l'article 2129 du Code civil du Québec, le client peut mettre fin au contrat d'entreprise en payant à l'entrepreneur la valeur des travaux réalisés avant la notification de la résiliation. Ce dernier doit également, le cas échéant, rembourser au client les avances excédentaires reçues. En l'espèce, la demanderesse doit 7 836 $ aux défendeurs, soit le montant de l'acompte payé (15 600 $) moins la valeur des travaux lors de la résiliation, qui est plutôt de 7 763 $. En ce qui concerne les armoires de cuisine, les défendeurs ont toujours voulu qu'elles soient en bois massif. Ils ont cru que l'estimation et le contrat répondaient à leur demande, car ceux-ci mentionnaient des «kitchen cabinets in maple with opaque finish». Ils n'ont jamais compris qu'une bonne partie des armoires serait composée de bois aggloméré avec une mince lisière de bois. La demanderesse avait l'obligation d'informer les défendeurs quant à méthode de fabrication des armoires, qu'elle connaissait fort bien, et ce, tant en vertu du Code civil du Québec que de la Loi sur la protection du consommateur. D'ailleurs, selon la Cour suprême dans Richard c. Time Inc. (C.S. Can., 2012-02-28), 2012 CSC 8, SOQUIJ AZ-50834275, 2012EXP-836, J.E. 2012-469, [2012] 1 R.C.S. 265, il faut accorder au consommateur un faible degré de discernement et accepter qu'il ne soit pas très aguerri. Par conséquent, la demanderesse devait révéler aux défendeurs que les armoires ne seraient pas entièrement construites en bois d'érable massif. Le contrat doit donc être résilié quant au volet des armoires d'une valeur de 20 240 $. Enfin, les défendeurs ont droit à des dommages-intérêts de 2 000 $ chacun pour les troubles et inconvénients subis, mais leur demande d'indemnité à titre de dommages exemplaires est rejetée.


Dernière modification : le 13 décembre 2012 à 22 h 30 min.