En bref

L'entrepreneur, qui a posé des bardeaux sur le toit de l'immeuble de ses clients, à l'insu de ceux-ci et alors que ces travaux étaient exclus du contrat d'entreprise, ne peut leur réclamer le solde contractuel impayé.

L'appauvrissement d'un entrepreneur qui a effectué par erreur des travaux exclus du contrat n'est pas injustifié puisqu'il résulte de sa négligence.

L'expression «quelque moyen» employée à l'article 230 de la Loi sur la protection du consommateur implique nécessairement un geste volontaire, une façon de faire pour parvenir à une fin, ce qui exclut la réclamation d'un solde contractuel pour des travaux exécutés par erreur par un entrepreneur.

Résumé de l'affaire

Requête en réclamation d'une somme d'argent (13 571 $). Demande reconventionnelle en diminution d'un prix de vente et en réclamation d'une indemnité à titre de dommages exemplaires (16 298 $). Accueillies en partie.

Les défendeurs ont retenu les services de la demanderesse pour l'achat et la construction d'une maison neuve pré-usinée. Outre le contrat de vente, ils ont signé une «convention d'érection» prévoyant les travaux que la demanderesse s'engageait à effectuer. Il était également prévu que celle-ci fournisse les matériaux qu'elle devait installer. La convention précisait aussi que la pose des bardeaux du toit n'était pas comprise dans le forfait. En effet, le défendeur étant un entrepreneur général en construction, il souhaitait faire exécuter cette tâche par ses employés. Or, malgré ce qui avait été convenu, un sous-traitant de la demanderesse a posé les bardeaux sur le toit de la résidence. Cette dernière prétend qu'il s'agit d'une erreur et que les défendeurs n'ont jamais protesté en voyant les travailleurs installer les bardeaux. Elle leur réclame donc 13 571 $ pour les coûts d'installation (3 517 $) ainsi que l'enrichissement injustifié dont ils ont bénéficié (10 054 $). Pour leur part, les défendeurs réclament 13 798 $ en réduction du prix de vente en raison de la mauvaise exécution de certains travaux. De plus, ils prétendent que l'installation de bardeaux, à leur insu, en violation du contrat intervenu, constitue une pratique interdite au sens de l'article 230 a) de la Loi sur la protection du consommateur. Par conséquent, ils réclament également une indemnité de 2 500 $ à titre de dommages exemplaires.

Résumé de la décision

Étant donné que la demanderesse admet qu'il y a lieu de réduire sa réclamation pour tenir compte des travaux inexécutés ou qui nécessitent des correctifs, ainsi que l'ont demandé les défendeurs, sa facture sera réduite de 479 $ et sa requête sera accueillie pour la somme de 3 037 $. Par ailleurs, le défendeur a démontré qu'il était en vacances à l'extérieur de la ville lors de la pose des bardeaux. Par conséquent, ceux-ci ont été installés à l'insu des défendeurs. La demanderesse ne peut prétendre que ces derniers se sont enrichis injustement au sens de l'article 1493 du Code civil du Québec (C.C.Q.). En effet, ainsi qu'il est énoncé dans Bertrand c. Construction P. Demers inc. (C.A., 2001-04-10), SOQUIJ AZ-50085260, J.E. 2001-824, [2001] R.J.Q. 851, il ne peut être question d'appauvrissement injustifié lorsque l'appauvrissement d'une partie résulte de sa négligence, comme en l'espèce. Si la demanderesse avait été diligente, elle aurait su que le contrat excluait expressément la pose des bardeaux. Qui plus est, l'entente intervenue constitue un contrat à forfait dont le prix ne pouvait être modifié, à moins d'une entente entre les parties à cet effet (art. 2109 C.C.Q.). Quant à l'argument des défendeurs basé sur l'article 230 de la loi, celui-ci doit être rejeté, car cette disposition ne vise pas les erreurs, mais bien des pratiques commerciales. D'ailleurs, l'expression «quelque moyen» employée par le législateur implique nécessairement un geste volontaire ou une façon de faire pour parvenir à une fin, ce qui exclut l'erreur ou la méprise. Ainsi, la pose de bardeaux par la demanderesse constitue une erreur et non une pratique commerciale interdite. Outre une diminution du prix de vente de 479 $, les défendeurs n'ont donc droit à aucun dédommagement.


Dernière modification : le 20 octobre 2011 à 17 h 49 min.